La Chamonice - Aout 2008

En bref

Participants: Ludo et Virgile
Grands absents: la cime du Tuba et du Corborant .... ben, non en fait plutot nos amis bourrins (et moins bourrins) qui auraient pas pu venir

Itinéraire:   tracé Google Earth    
sur GoogleMaps


Compte-rendu de la ChamoNice (9-29 août 2008), rédigé par Virgile, complété et commenté plus personnellement par Ludo

Les Chiffres:

21 jours
537 km horizontaux
34,13 km de dénivelé positif, un peu plus en négatif
28 sommets
66 cols

Ca nous fait une moyenne de 1620m et 25km par jour !!!


la F.A.Q

Voici les questions qu'on nous a posées et auxquelles il vaut mieux répondre avant de présenter un CR détaillé

Q: L'itinéraire vous l'avez trouvé où?

Ludo: on l'a fait nous même, évalué étape par étape sur ce qui me semblait réalisable, en pratique on parcourait souvent plus que ce qui était prévu (j'estimais  que 2000m de D+ par jour serait a la limite du surhumain avec nos gros sacs). Ca nous a souvent permis d'éviter les averses en s'arrêtant plus longuement dans les villes ou refuges. Par rapport a notre itinéraire prévu, 2 gros changements: on a raccourci le passage de la Vanoise pour éviter une méchante perturbation, et nous ne sommes pas passés a St Martin Vésubie profitant d'une grosse superette a Isola 2000.

Virgile:J'avoue que c'est surtout Ludo qui s'est occupé de tracer l'itinéraire, modulo quelques changements que j'ai suggérés (passage par Saint Nicolas de Véroce et le Mont-Joly, et par Vallouise plutôt que Briançon). L'idée globale était de passer dans un village assez gros pour avoir une épicerie tous les 3 jours. À part dans le Mercantour que Ludo connaît bien, il s'agissait aussi de privilégier les itinéraires indiqués comme balisés sur la carte. Ce n'est pas une garantie que ça se passera bien sur le terrain, mais ça améliore quand même les chances.


Q: Vous mangiez quoi?

Ludo: pains au lait le matin, charcuterie-fromage le midi, et soupe + pates/riz/polenta (avec un peu de sauce tomate) les soirs de bivouac. Rajouter à ça 2 ou 3 grignottages bien fournis dans la journée, un paquet de biscuits salés et des pommes ou compotes en dessert et volà. On a profité de nos passages dans des villes pour varier un peu notre régime (fruits frais intransportables, tomates, boites de conserve, ...) mais il était hors de question de transporter ça à dos de bourrin!

Virgile: N'oublions pas le petit carreau de chocolat qui va bien après le dessert. En termes de grignotage, c'était du classique: gâteaux secs (dont beaucoup de Petits-Déjeuners,malgré leur tendance à se réduire en miettes facilement), fruits secs, barres de céréales, pâtes de fruits, et bien sûr crème de marrons Clément Faugier, la seule, l'unique, la vraie, dont les versions grand format ont aussi servi de dessert à l'occasion.


Q: C'etait pas trop dur? / je pensais vous voir revenir tout cassés

Ludo: Ben NON!, mais ça vous verrez ci-dessous, au bout d'un moment on était réglés comme du papier à musique: réveil 6h45, départ avant 8h, pause grignottage vers 10h30, parfois grignottage salé vers 11h30/12h, picnic vers 12h30/13h, pause regrignottage vers 15h ou 16h, plantage de tente si possible vers 18h30/19h, coucher entre 20h et 21h ... GROSSE NUIT! et entre tout ça ben on marchait régulièrement, avec peu d'accélération majeure, parfois poussant un peu le rythme pour pouvoir arriver pas trop tard en ville ou à un refuge, ce qui nous a permis de bien tenir sans trop de casse.

Virgile: C'est vrai, je pensais que ce serait plus compliqué, mais une fois habitués au poids du sac, ça s'est plutôt bien passé.


Q: Y'a bien eu des moments un peu plus dur que les autres quand même?

Virgile: Ben c'est sûr qu'il y a eu quelques passages de stress. Sans anticiper sur le compte-rendu, on peut dire qu'il y a eu deux loose topos dont nous nous serions vraiment bien passés, la première un peu au-dessus de Bozel (Jour 6) et la seconde en descendant de la Tête Rougnouse de la Guercha. Dans les deux cas, les prévisions météos pour la journée n'étaient pas fameuses, et on n'avait donc pas très envie de perdre trop de temps dès le matin. Côté bobos, il y a eu quelques ampoules (Ludo une grosse au début, moi deux après Vallouise et un changement de semelles), qui ont un peu gâché le plaisir par moments. On a aussi un peu pris froid au dessus de Rabuons, mais malgré un peu d'inquiétude, surtout pour Ludo, ça n'a pas dégénéré.


Q: Vos sacs pesaient combien?

Ludo: on a pas mesuré, mais j'estime au départ des villes avec la bouffe pour 2 à 4 jours et 3 à 4 litres d'eau autour de 15 à 17kg. Le mien faisait 9.5kg sans l'eau, le gaz, la nourriture et la tente; cad avec mes affaires et tout le "petit" matériel.

Le CR

Le texte de Virgile en noir, et les commentaires de Ludo en vert (attention il y a donc 2 premières personnes !!!)

Jour 1 (09/08/2008) Chamonix (Les Tissourds) - Le Champel. 1400m D+ 24km

Réveil vers 7h30 au camping des Arolles où nous avons passé la nuit avec les parents et la sœur de Ludo. La journée s'annonce belle jusqu'au moment où Ludo essaie de faire chauffer l'eau du thé avec son réchaud, celui qui doit en principe nous servir ces 3 semaines. Ce dernier refuse obstinément defonctionner. Heureusement, mon réchaud, celui-là même qui avait été acheté à Alagna Valsesia il y a 6 ans dans des circonstances à peu près analogues (sauf qu'à l'époque on avait déjà passé un bivouac sans réchaud - mais avec du bois) est fidèle au poste et à sa mission de remplaçant. Et du coup, on peut gagner un peu de poids en n'emportant qu'un réchaud (et en espérant qu'il tiendra).


Après le petit-déjeuner, on replie rapidement la tente (détrempée, donc on fait sécher la tente extérieure sur le sac de Ludo en marchant), et vient le moment du départ (9h30). Nous traversons l'Arve aux Pélerins et attaquons la modeste première montée du parcours qui nous mène sur le chemin du Petit Balcon (dite "promenade de l'Arve" sur les panneaux) en direction des Houches.

Aiguille de Bionnassay
L'Aiguille de Bionnassay depuis Bellevue. Tout à gauche, le Mont Lachat. Sous le nuage, le Dôme du Goûter et le Mont Blanc
Mis à part le fait que ledit chemin est moins plat qu'on ne pourrait le penser de la part d'un chemin de flanc honnête, il est très agréable, et nous arrivons rapidement en vue des Houches, où nous retrouvons la fin du parcours du premier jour du Off du Mont Joly de l'année dernière. Nous prenons notre pain dans la boulangerie (vers 11h) où l'année dernière quelques viennoiseries étaient venues nous regonfler un peu avant d'entamer la montée vers le col de Voza et le Prarion. Cette année, cette montée est beaucoup moins terrible malgré le poids des sacs, lourds de 3 jours complets de ravitaillement, auquel nos épaules ne sont pas encore habituées (sacs estimés à environ 17kgs a vue de Ludo). En effet, nous n'avons pas fait 60km auparavant, et il fait un temps superbe et pas trop chaud. Une montée sans histoire nous amène donc au col.
Après une promenade de l'Arve bien difficile comparée a la pente, mais qui a été l'occasion de nous habituer à nos gros sacs, la montée au col de Voza se passe bien, elle est moins raide que ce que je craignais; je laisse quand même Virgile partir devant au départ ce qui ne nous empêche pas de terminer ensemble; on n'a pas encore le même rythme mais ça se passe bien. On double des randonneurs et se fait distancer par quelques autres.



Au col nous constatons d'une part que les glaciers du Mont-Blanc sont vraiment rachitiques cette année, et d'autre part que le col est un arrêt du tramway du Mont-Blanc et qu'il y a plein de monde. Du coup, nous décidons d'avancer un peu sur le trajet du tour du Mont-Blanc pour aller manger au calme.

Quelle horreur en arrivant au col de Voza: c'est plein de monde, plus dans la catégorie touriste que randonneurs, moi qui espérait faire une pause ici, je ne peux même pas supporter l'idée de m'arrêter. Même si je cohabite bien avec les randonneurs de tout poil, pendant ces 3 semaines je n'ai pas envie de voir des touristes, c'est comme ça!
col du Tricot
Le col du Tricot depuis le Mont Lachat


Nous trouvons un coin paisible peu après l'arrêt suivant, à l'embranchement entre le GR et le chemin qui descend vers Le Champel où nous avons réservé deux place au gîte pour la première nuit (vers Bellevue). Au cours du repas, nous décidons rapidement que cette première journée serait décidément trop courte si nous ne faisions pas une petite option l'après-midi. Nous rajoutons donc 350 petits mètres de dénivellé en passant au Mont Lachat, d'où on découvre une superbe vue sur le massif du Mont-Blanc et la vallée de Chamonix. La descente assez raide emprunte en partie le trajet du tramway avant de nous ramener à notre point de pique-nique.

La descente raide du Mont Lachat m'a causée une ampoule qui va s'accentuer et devenir la pire ampoule que j'ai jamais connue, mais c'est pour plus tard. En tous cas elle est bien raide, et avec le gros sac j'ai pas trop aimé.
De là, nous attend une descente sans histoire et ombragée sur Le Champel, par le Planet et le pont des Places. L'accueil et la cuisine du gîte du Champel sont excellents et vient heureusement conclure cette courte première journée.
Domes de Miage
Les dômes de Miage

 La fin de journée nous a quand même value quelques descentes raides et petites remontées pénibles. Bien qu'on arrive tôt au gite, peu après 16h, le repos est appréciable, surtout que demain les choses sérieuses commencent!



Jour 2 (10/08/08) Le Champel - Plan Jovet. 2200m D+ 24km

Après un robuste petit-déjeuner, et un départ plus tôt que la veille (8h10) nous descendons rapidement dans la vallée des Contamines par une large piste bien raide qui nous mène au hameau de la Villette, où nous tournons à gauche pour traverser le Nant juste en-dessous de Saint-Nicolas de Véroce. Commence alors une montée efficace et menée à un rythme soutenu sur Saint-Nicolas, où nous complétons notre cargaison d'eau au pied de l'église. Nous gagnons ensuite le plan de la Croix par un sentier là encore efficace, puis le Déchappieu par une piste un peu plus calme, qui se poursuit jusqu'à la croix du Christ.

 

Saint-Gervais
Saint-Gervais, la Pointe de Platé, le Dérochoir, et les Fiz

Après la traversée du Nant, Virgile a de suite mis un rythme de montée très élevé, jusqu'à St Nicolas de Véroce où j'ai pu passer devant et diminuer légèrement le cadence moyenne qui me semble encore très honorable ... dans le fond de vallée on croise peu de monde: les gens doivent monter ça en voiture. Il faut dire qu'une bonne partie est en piste peu intéressante, mais nous voilà à pied d'œuvre pour le final du Mont Joly qui me fait un peu peur, enfin ce qui me rassure c'est qu'on arrive au Pavillon du Mont Joly en bonne forme et à une heure raisonnable: on devrait atteindre le sommet vers midi. Je crois que c'est la première fois que je me rends compte que l'on va plus vite que mes prévisions: J'espérais manger vers le pavillon mais il n'est même pas 11h: on avance vite! On fait peu de pauses, et arrivera à monter au Mont Joly depuis la vallée à 450m/h pauses comprises (et avec les gros sacs). Cette sous-estimation du temps de trajet sera une constante de ce périple, petit à petit je vais diminuer le temps prévu pour faire certaines portions, mais à chaque fois Virgile ne me croit pas; du coup je rallonge ... et on est en avance! enfin bon ça aura l'avantage de nous donner le moral, mais aussi de prévoir les temps "au pire" au lieu d'"au mieux", et donc de rester dans les temps lorsque des looses topos ou autres nous ralentiront. Je me prends même parfois au jeu d'annoncer volontairement un temps 30 minutes plus long que mes prévisions pour assurer le coup!
arrivee au Mont Geroux
Virgile à l'arrivée au Mont Géroux


A la croix du Christ, nous nous autorisons là une petite pause grignotage, avant d'attaquer les pentes raides qui mènent au Mont Joly via le Mont Géroux, toujours à un rythme bien soutenu puisque nous arrivons à doubler une proportion notable des marcheurs qui montent aujourd'hui, malgré des sacs notablement plus lourds. Cependant, dans les derniers lacets de la montée, des débuts de crampes me suggèrent qu'il serait sage de boire plus et d'avancer un peu moins vite. Ludo, qui n'a pas ce genre de problème me prend un peu de poids, et nous achevons la montée sans histoire.

Je me suis vraiment fait plaisir dans cette montée au Joly, faire la course avec les randonneurs à sac léger était assez rigolo, je suis content d'être ici, dêtre en forme, et de me donner à fond, en pensant que la journée est difficile et que je peux me lacher car demain devrait être plus cool. Puis je me rends compte que Virgile a du mal, j'ai envie de doubler encore 2 ou 3 randonneurs avant le Mont Géroux mais ce ne serait pas raisonnable, cette Chamonice on la fait a 2 pour se tirer la bourre ensemble, mais surtout pour s'attendre dans les coups dur ... j'attends donc Virgile et lui prends 1l d'eau et du pain pour l'alléger (je crois que son sac était plus lourd que le mien). De toutes façons j'ai la forme et j'aime bien jouer au porteur. Certains randonneurs nous font des remarques sur la grosseur de nos sacs, je leur dis simplement que nous continuons vers le sud; j'ai pas encore envie de parler de notre objectif, il est trop loin, j'ai trop peur de m'arrêter a Aime après un cuisant échec et en ayant fait si peu ...
massif du Mont-Blanc
Le massif du Mont Blanc depuis l'Aiguille Croche


Après une bonne pause pour contempler le superbe panorama du sommet (Mt Pourri, Pierra Menta, massif du Mt Blanc, Vanoise, Etendard, Belledone, ...), nous nous éloignons un peu sur la crête pour pique-niquer dans un endroit à peu près tranquille vers la Tête de la Combaz. Nous reprenons ensuite notre parcours de crête via la Tête du Véleray, où le chemin commence à se faire plus rocheux et surtout plus aérien. Il le reste jusqu'à la montée sur l'Aiguille Croche, petit extra avant de descendre sur le col du Joly.

Je craignais la crête du Joly, de peur qu'elle soit vertigineuse ... ce n'est pas le cas, on croisera même 2 VTTistes portant leur vélo le long de la crête pour aller faire une descente plus loin ... quand même péchus les gars, le chemin est pas large non plus! A l'Aiguille Croche, je réclame une pause nu peu longue: la grosse montée commence à me peser, et je sens arriver la fatigue, mieux vaut se poser 30 minutes et pouvoir marcher plus tard ce soir que de risquer de craquer le 2ème jour.

Au Mont Joly
Virgile et Ludo au sommet du Mont Joly, sur fond de Mont Blanc


La descente est raide mais facile, et nous arrivons rapidement au monument funéraire où nous trouvons une large piste qui nous amène au col du Joly. Désservi par la route et encombré d'une clientèle bruyante, le chalet du Joly ne nous donne pas envie de nous attarder outre mesure, et après avoir écouté les (mauvaises) prévisions météo pour les deux prochains jours, nous nous éloignons rapidement en direction du col de la Fenêtre.

Là je crois que j'ai fait une crise d'allergie à la foule pire que la veille, cette fois il y a des motos, des poucettes, ... les pauvres vaches servent d'attractions touristiques, dire que je voulais bivouaquer proche d'ici (en plus il n'est pas 16h); passons le col de Fenetre pour avancer!


Assez rapidement, l'ambiance redevient plus sauvage, puis plus alpine, le col de Fenêtre se trouvant dans une crête bien rocailleuse. Le chemin est cependant excellent, et nous montons sans histoire. Nous descendons ensuite vers le lieu de notre premier bivouac, que nous pensons effectuer vers les Chalets de Jovet où la carte montre qu'il doit y avoir du terrain plat.

Auparavant, nous faisons de l'eau pour le bivouac, en utilisant la pompe filtrante de Ludo qui fonctionne très bien. J'utilise quand même une pastille de micropur pour ma gourde, vu qu'il m'en reste plein et qu'elles seront périmées à la fin de l'année. Nous remplissons aussi nos bouteilles supplémentaires (on a emmené de quoi prendre 1 ou 2 litres supplémentaires chacun à remplir avant le bivouac). Par flemme, j'attache la mienne en haut de mon sac au lieu de la glisser en sécurité dedans. Évidemment, ça ne rate pas: en redescendant vers le chemin, une secousse fait glisser la bouteille, qui se déchire sur un rocher, et se retrouve bonne àjeter. Heureusement, il me reste le camel-bak de secours fourni avec mon sac à dos, que je range soigneusement une fois rempli. Arrivés aux Chalets de Jovet, nous découvrons une belle prairie bien plate, avec un ruisseau en contrebas pour faire la vaisselle. Bref un très bon lieu de bivouac.

 

coucher de soleil sur le Mont Tondu
Coucher de soleil sur le Mont Tondu

On finit quand même cette journée bien fatigués, la dernière descente a été pénible pour moi suite à la fatigue de toute cette journée. Tout de même cette journée m'a rassuré pour la suite: sur le papier on a fait une journée plus dure que les journée difficiles que j'ai planifiées, et cela s'est relativement bien passé; c'est de bonne augure pour la suite. Demain devrait être plus facile, et puis je dois avoir la forme si je veux faire la tête N des Fours (j'adore les options, surtout si elles vont au sommet)


Jour 3 (11/08/08) Plan Jovet - Plan de la Lai 1060m D+ +160m sans les sacs 19km en tout 

La journée s'annonce mal: 7h30, je renverse mon camel-bag dans la tente et trempe mon sac de couchage et mon tapis de sol, vue la météo prévue l'après midi et qu'il faut faire sécher la tente sur mon sac le matin j'ai peur de dormir dans le mouillé ce soir. Enfin bon j'attaque quand même les premières montées à bon train, maintenant Virgile me laisse en général devant et se contente de suivre. Les douleurs de la veille au soir sont oubliées et je retrouve ma forme de la veille. Tant mieux car il va falloir faire la course contre la perturbation, surtout si on veut monter à la tête Nord des Fours

La météo a prévu un temps maussade aujourd'hui, mais aussi un début de matinée à peu près correct. Nous montons tranquillement au col du Bonhomme sous le soleil et apercevons notre première marmotte. Du col, un sentier de flanc monte en direction du col de la Croix du Bonhomme et de son refuge, à travers les rochers. Les nuages commencent à arriver, mais nous prenons le temps de faire un petit aller-retour à la Tête Nord des Fours (10h45) par le col des Fours où nous jouissons malgré tout d'un beau point de vue sur le Mont-Blanc (Vanoise, Pourri, Etendard et cheval noir, ). Mais nous voyons les nuages sombre approcher!

 

col du Bonhomme
Col du Bonhomme et Aiguilles de La Pennaz depuis la Tête Nord des Fours

A la montée on croise un peu de monde, des étrangers en itinérant, et 2 personnes qui montent en courant (préparation de l'UTMB?). Ce qui m'étonne c'est que nous garderons le groupe de coureurs a vue jusqu'au col des Fours, la marche ça avance quand même vachement bien aussi, surtout en montée, ça je le savais mais ça me surprend a chaque fois!

Petite pause ensuite au refuge avant la descente au col de la Sauce par la crête des Gittes, où nous montons au passage au point culminant. Après un pique-nique un peu en dessous du col de la Sauce (j'en profite pour essayer de faire sécher mon duvet ... mais on repart vite car il fait froid), nous descendons au refuge du Plan de la Lai, où nous prenons deux places pour la nuit. De toute façon, on a rendez-vous là avec Papy le lendemain, il ne sert à rien de continuer plus avant.


Une demi-heure après notre arrivée, la pluie commence à tomber, et nous nous retranchons dans le refuge plutôt que nous promener autour du Cormet de Roselend, ce que nous ferons plus tard à l'occasion d'une éclaircie. Cette petite balade est cependant coupée un moment par un troupeau de vaches changeant de pâturage, tandis que nous constatons que c'est l'heure de la collecte du lait. Au repas du soir, nous sommes à la même table qu'un couple de retraités qui ont l'air d'avoir bien baroudé, et qui sont en train de faire le GR5 depuis chez eux en Franche-Comté jusqu'à la Côte, même s'ils comptent prendre plus de temps que nous. Le temps incite à raconter ses meilleures histoires de rando sous la pluie, à pied comme à vélo, avant d'aller se coucher en sachant que les prévisions sont pire pour le lendemain... Auparavant, nous remontons un peu la route pour capter le téléphone et un message de Papy nous confirmant que le mauvais temps ne l'arrêtera pas et qu'il sera au rendez-vous demain.
Aujourd'hui j'ai vraiment aimé les montées mais les descentes étaient difficile, le poids du sac, mon ampoule, mais aussi le fait que je me sens pas bien en descente (des restes de mes problèmes vagaux et de dos peut être) bref l'arrivée au plan de la Lai a été un peu longue; mais bon de là à s'arrêter de marcher à 14h c'est un peu dur. Je voudrais avancer pour se rapprocher de l'objectif, mais il pleut vraiment fort et de toutes façons il faut attendre Papy. Les discussions au refuge m'ont fait du bien, en voyant nos deux retraités se diriger vers Menton (ils prévoient de mettre encore un mois) cela me décomplexe et je me dis que pourquoi pas nous, on veut aller plus vite, mais on doit pouvoir le faire, au moins en grande partie; je commence à oser parler de notre objectif, toujours un peu fou à mes yeux, mais peut être bien réalisable, et peut être plus facilement que je n'aurais cru. On discute aussi avec un couple plus jeune qui fait du vélo et de la via ferrata, on discute trail, et de l'esprit trailer qui est en train de changer, de l'arrivée de la compétition, au sens classique, dans ce sport, que lui il trouve ça dommage et moi d'autant plus que c'est un de mes sports favoris, et qui me motive le plus ces temps-ci.


Jour 4 (12/08/08) Plan de la Lai - Aime 1400m D+ - 32km

Comme prévu, il fait gris, et le sol est trempé par la pluie de la nuit, mais il ne pleut pas vraiment au départ de cette étape, un peu retardé par les 20 minutes de retard de Papy et de son beau-frère Damien, mais il faut bien dire qu'ils ont déjà bien du mérite à nous rejoindre par ce temps. Nous quittons comme prévu le Plan de la Lai (8h50) par le GR5, et montons tranquillement à travers les alpages jusqu'à découvrir en dessous de nous le lac de Roselend. Nous finissons par rattraper nos commensaux de la veille, partis avant nous, et nous nous disons au-revoir, puisque nous quittons peu après le trajet du GR5 pour continuer vers le col du Coin.

Ça fait plaisir d'avoir de la compagnie, on peut varier un peu les discussions, et puis je crois que ça fait un peu aussi plaisir a Papy de nous rejoindre, il aurait certainement aimé nous accompagner plus longtemps, ça aurait été cool, mais bon chacun fait avec ses obligations, et puis c'est déjà ça de pris. J'ai beaucoup pensé aux gens qui n'étaient pas là pendant ces 3 semaines, pas trop au début, mais de plus en plus ... c'est ce qui m'a le plus manqué. Quand on part en randonnée sur plusieurs jours, on pense à son confort que l'on va perdre ... je ne l'ai pas regretté une seconde, mon matelas gonflant me suffit, et un peu d'humidité la nuit ça se supporte. Non ce qui me manquait c'est mes amis et ma famille, en tous cas c'est à eux que j'ai pensé dans les montées pas à mon lit ou ma douche, ou mon petit confort.
Je crois que Papy et Damien ont été surpris par notre rythme avec les gros sacs: on mène un bon train et la motivation est bien là. Il faut dire que depuis 3 jours on commence à s'habituer aux sacs ... et à les alléger ...

Pierra Menta
La Pierra Menta

Auparavant, à l'instigation de Papy, nous nous payons une descente tout schuss dans l'herbe mouillée à hauteur de l'alpage de Dunand, afin d'éviter quelques mètres de dénivellé en reprenant le chemin un peu plus haut qu'en suivant la piste. C'est ensuite la bonne petite remontée que nous avions emprunté à la descente avec Adrien, Dim et Romain il y a 6 ans, puis la bifurcation vers le col du Coin. La pente est moins raide, mais nous compensons par un rythme qui reste intéressant. Le temps est toujours gris et humide, mais techniquement il ne pleut pas. Un peu après avoir dépassé le chalet du Coin et attaqué la montée finale au col, Damien exige et obtient qu'on fasse la pause pique-nique un peu tôt. Il faut dire que c'est lui qui porte une grande partie de leur bouffe, Papy ayant besoin de place pour son matériel photo. À l'issue du repas, Damien décline l'invitation à terminer la montée et préfère entamer la redescente. Papy, lui, nous suit, et nous arrivons bien vite au col.

Eh oui, je l'avoue j'ai tapé la bourre pour arriver au col, mais il fallait fêter dignement le départ de Papy ... eh oui, nous revoilà à 2, l'équipe rodée, c'est certainement comme ça qu'on avance le mieux car on commence à bien se connaitre avec Virgile, et puis la météo est bien meilleure que certains nous avaient prédit; jusqu'à 17h, nous nous en sortons avec une grosse averse assez courte, plus des gouttes de temps à autres, et pleins de nuages bien sûr.

au col du Coin
Nico et Ludo au col du Coin, sur fond de Pierra Menta


 Nous nous séparons alors, et tandis que nos deux compagnons d'un jour retournent au Plan de la Lai, nous nous préparons à passer le col suivant. Une descente rapide nous amène au refuge de la Coire, où nous prenons de l'eau puis une piste vers le Cormet d'Arêche. De là, nous gagnons par un chemin de crête le col de la Grande Combe, alors que la pluie nous rattrape, mais sans grande conséquence pour le moment. De là, nous gagnons sans encombre le col des Génisses avant de commencer la longue descente vers Aime, tandis que le temps semble s'améliorer un peu.

J'avais prévu de bivouaquer au col des Génisses, mais vu qu'on y est arrivés vers 15h on allait pas attendre, on a donc décidé de descendre à Aime ce devrait être rapide ... enfin c'est ce que je croyais


La descente s'effectue par de grands chemins bien tracés vers le Boulissoir, et nous atteignons assez rapidement le petit hameau de La Pesée, où un rayon de soleil nous attend. Nous trouvons ensuite facilement le chemin de descente vers Tessens qui part du Chapieu.

Alors là je me permets de noter un certain optimisme de Virgile, certes jusqu'au Chapieu ça se passe pas trop mal, modulo le fait que le chemin balisé sur la carte n'existe pas, modulo le fait que la piste ne correspond pas partout à la carte, modulo le fait que cette piste ferait horreur à Nico(D), elle descend doucement, bref elle est longue plate et monotone, parfois on essaye de trouver les bons sentiers qui coupent les lacets et heureusement ça marche plutôt bien.


 Malheureusement, à une intersection avec une piste qui part à flanc, ce dernier s'interrompt. Nous nous engageons sur la piste, pensant que la descente va reprendre assez vite, mais ce n'est pas le cas, et nous nous retrouvons sur une route goudronnée, assez loin de notre objectif initial, vers un arboretum. Ludo prend le temps de soigner un peu une méchante ampoule au pied, après avoir appris d'une automobiliste compatissante que c'est la faute de ses chaussettes (super info, et tellement sûre). Heureusement, les pistes de traverse indiquées sur la carte existent bel et bien, et malgré un balisage là encore sujet à caution, nous arrivons à Tessens sans avoir perdu trop de temps. En tout cas, nous sommes encore dans les temps pour faire le ravitaillement à Aime ce soir. Nous quittons Tessens par la route avant de prendre le chemin balisé qui évite les lacets de la route... sauf que ce chemin n'a pas l'air d'exister pour le premier lacet. Grmbl. Heureusement, dans le deuxième lacet, après une première tentative un peu précipitée, nous finissons par le trouver, et il nous amène bien à Aime. Ou plutôt dans un lotissement sur les hauteurs d'Aime. Heureusement, un habitant nous indique un raccourci piéton pour gagner le centre ville. Tant mieux, car pendant ce temps il a recommencé à pleuvoir, et cette fois ça a l'air sérieux.

Alors que dire de cette descente sinon que le balisage était catastrophique, que la seule chose de bien indiquée dans toute la descente est la route (et encore c'est parce qu'il suffit de suivre le bitume), sinon vraiment au niveau topo c'était très dur, j'ai appris ici à caler la carte derrière mon dos pour pouvoir la sortir toutes les 2 minutes. Rajouter à cela une ampoule, attention les ampoules je connais, mais non celle là est beaucoup plus profonde que la normale, habituellement je serre les dents et ça passe, là ça veut pas passer, j'essaye quand même d'avancer mais ça fait tellement mal que je finirai la journée avec des douleurs dans tout le pied: le pied s'est crispé sous la douleur de l'ampoule et je me retrouve avec un pied et une cheville raides et douloureux! Quant à l'automobiliste elle était gentille, mais franchement je ne crois pas que c'était la bonne remarque, ce n'était pas trop le moment, et j'en connais certainement plus qu'elle sur les causes des ampoules, enfin j'ai répondu poliment et suis retourné à mes soins. Dans les jours suivants, l'ampoule restera douloureuse encore 4 jours, des perçages et vidages réguliers amélioreront le quotidien, une bande et compeed aussi; avec le temps l'ampoule deviendra plus vilaine mais moins douloureuse, et c'est le principal.


Ludo s'occupe du petit ravitaillement (Bozel n'est pas loin), et nous partons en quête du bivouac, sous une pluie qui redouble. Ça tombe bien, il faut se taper un bon kilomètre sur la N90, sillonnée de camions et pas trop prévue pour le passage des piétons. Probablement le pire moment de ces trois semaines au final. Cependant, la chance ne nous a pas complètement abandonné: nous trouvons le départ du chemin vers la passerelle sur l'Isère (pas grâce aux balises), qui franchit la voie ferrée par un passage à niveau automatique alors qu'il est à peine carrossable, et nous remontons sur le Châtelard, puis sur une piste qui passe sous la ligne à moyenne tension. Nous bivouaquons juste sous cette ligne, dans un pré bien plat. Il était temps, car nous sommes déjà bien mouillés. La tente est vite montée, et un poncho nous permet de cuisiner au sec.

Eh oui je suis d'accord, s'il fallait citer un point noir à cette traversée ce serait Aime, mais pourquoi? Qu'est-ce qui était le pire? Le balisage absent, ou pire faux dans toute la vallée? la pluie torrentielle? Les 1.5km sur la nationale arrosés par les camions? L'ampoule douloureuse? Le fait que l'on s'est fait un des plus gros dénivelés négatifs ce jour là et que la veille je n'aimais pas les descentes (heureusement là ça allait un peu mieux si on fait abstraction de l'ampoule) le bivouac sous la pluie et sous une ligne moyenne tension (on peut faire plus bucolique)? Eh bien je sais pas, et vraiment j'ai pas envie de retourner là bas pour savoir!
La fin de journée a vraiment été dure, entre les douleurs et l'humidité, et la nuit ne fut pas très récupératrice. Un point positif: le poncho de Fabien fait une très bonne avancée à la tente et permet de cuisiner au sec. Merci Fabien! 



Jour 5 (13/08/08) Aime - Bozel 2030m D+ 29km


Je relis mes notes que j'ai prises pendant la rando et je lis "départ humide et raide" pensais-je au chemin, à sa pente et au terrain détrempé ou à nous, nos vêtements et nos muscles, eh bien je sais pas car si il y a une chose que je me rappelle bien c'est que cela s'applique aux deux! Au départ les chevilles et genoux sont douloureux, le balisage est toujours pitoyable, Virgile me dit avoir vraiment mal au genou, depuis la veille en fait; et les quelques pommades de la nuit n'ont pas aidé. Je commence à me dire qu'on risque d'abandonner bientôt, et si le genou de Virgile ne se remet pas ... Je sens que l'humeur est morose et un peu lourde, il faudrait expulser ces mauvaises pensées mais je sais pas comment. Faute de mieux, je donne le rythme, essaye de me charger discrètement pour alléger le sac de Virgile et me prépare à un longue et difficile journée.

La pluie a cessé pendant la nuit, et il fait même plutôt beau. Ça permettra de faire sécher la tente dans la matinée en la laissant sur le sac de Ludo. En attendant, il s'agit de monter sur Longefoy, (en passant par les Esserts car le chemin direct que j'avais repéré sur la carte n'existe pas. On ne peut même pas dire que je sois surpris, Aime est tout simplement la région la plus mal balisée que je connaisse) où nous prenons de l'eau, puis sur Montalbert, dépendance de La Plagne.
De là, nous prenons un chemin à flanc vers l'ouest, en direction de Mongésin, avant de nous retrouver sur un sentier de découverte botanique, qui serpente beaucoup avant de nous faire arriver aux chalets de Pralioud, où nous prenons une piste qui monte le long de la crête vers le plan de la Tigne, où nous pique-niquons en achevant de faire sécher les affaires de la veille.

Encore une petite ellipse de Virgile: le balisage toujours aussi mauvais nous a certes emmené aux chalets de Prarioux, certes par un joli sentier botanique, inutile de dire que cela ne correspondait pas au tracé sur la carte, mais bon de là à aller faire des détours sérieux incluant une bonne centaine de mètres de dénivelé inutiles, quand même, on a pas envie d'y arriver à la nuit au Mont Jovet!

Mont Blanc
Le Mont Blanc depuis le Plan de la Tigne




C'est là que nous sommes victimes une dernière fois du balisage particulier de cette vallée: la flèche vers un "mélèze remarquable" plutôt banal et à la Tête du Jarset ne mène que vers l'arbre. Heureusement, un randonneur que nous croisons nous indique le vrai chemin vers le sommet. Il suffit de retourner à l'endroit du pique-nique et de prendre le chemin qui monte le plus. Comment avons-nous pu oublier d'appliquer l'axiome? En tout cas, ça monte bien, et la Tête du Jarset est rapidement gravie, avant une courte descente vers le lac Bovet. C'est ensuite la montée vers le Mont Jovet, là encore sans distance inutile, pour un très beau panorama. Il ne reste plus qu'à descendre en direction de Bozel. Du refuge du Mont Jovet, nous prenons la piste en direction la Cour, et de là le chemin vers Bozel. Après une courte loose topo (nous manquons la flèche placée bien dans l'ombre de la forêt et en dessous du chemin principal), nous nous retrouvons à la Praz. Un demi-tour plus tard, nous trouvons le chemin de descente, qui suit un très joli torrent dans le sous-bois. La descente sur Bozel est rapide, même s'il faut faire un peu de place aux gens de l'ONF en train d'entretenir le chemin. Nous ravitaillons dans une petite épicerie avant de nous diriger vers le camping de Bozel, bien ombragé, où nous passons la nuit.

Vanoise
Les glaciers de la Vanoise depuis le Mont Jovet


Encore une fois, on maintient notre avance et nous arrivons bien tôt au lieu de bivouac, le lac premier bivouac prévu, arrivée à 14h, mais vu qu'on avait pris de l'avance la veille c'est normal, ensuite on avait repéré un pré accueillant dans la descente, mais au refuge réalisant qu'on avait le temps de descendre en ville et d'avoir droit a une douche on décide de dormir au camping. Je reste devant dans la descente ce qui m'étonne car normalement Virgile descend mieux que moi, mais on tient un bon rythme et les pieds chauffent un peu, le final est certes très joli, mais la descente commence à me peser et mon pied est très douloureux, je boite. Je tiens en me disant qu'il ne reste plus que quelques km avant la libération: un camping, une douche et un repos bien mérité. Si on fait le bilan ça va beaucoup mieux que hier tout de même, je suis assez optimiste sur la suite de notre parcours, peut être grâce à notre petite avance, mais aussi grâce à mon pied gauche qui va mieux: au moins ça passe au repos, j'arrive a remarcher normalement. Seul point noir, la météo qui est catastrophique: demain réveil 6h15 pour partir plus tôt, ils prévoient de la pluie dès la mi-journée. La perturbation doit être froide en plus et durer 2 jours, avec une petite accalmie au milieu, et des risques de neige très bas; ça tombe bien on voulait passer des cols très hauts dans la Vanoise !!!


Jour 6 (14/08/08) Bozel - refuge de Péclet-Polset 2520m D+ -  25km

Vue la météo que nous avons prise hier soir, plutôt que de faire la crête du Mont Charvet comme prévu, nous décidons d'aller au plus court vers les refuges de Vanoise afin de pouvoir basculer vite demain sur Modane où nous laisserons passer la perturbation. Mais ça fait quand même une grosse journée en perspective. Histoire de ne pas perdre de temps, la montée commence à peu près à la sortie du camping. Hélas, le balisage est un peu succinct, et nous nous retrouvons sur un chemin de flanc à l'ouest de la dent du Villard, qui se perd plus ou moins à l'approche du hameau de Montcharvet. Nous rattrapons une piste de raquettes et VTT, mais elle finit par descendre dans la vallée, alors que nous voulons monter. Ludo avise alors une trace qui correspond plus ou moins à un chemin de la carte et semble aller dans la bonne direction... Erreur. La trace s'interrompt assez vite, et nous galérons une petite demi-heure dans un sous-bois aux pentes de plus en plus raides, jusqu'à ce que Ludo impose le demi-tour en raison de l'état du terrain. Pendant que nous rebroussons chemin, une guêpe vient me piquer à travers ma chaussette. Ce sera notre seule occasion de tester l'aspivenin, qui s'avère dans ce cas parfaitement efficace: très vite, je ne sens plus rien.
Nous revenons ensuite rapidement à une intersection montant pleine pente que nous avions négligé précédemment, faute de balisage: c'est en fait le chemin vers la cabane du Bec de l'Aigle, comme nous le confirme une flèche située un peu plus haut. Nous revoici sur de bons rails, après avoir perdu une heure, que nous aurions mieux employée à faire la Dent du Villard comme prévu initialement. Mais bon, on ne choisit pas toujours ce qu'on fait. Le rythme de montée au Bec de l'Aigle permet cependant de corriger un peu ce retard, et nous nous y accordons une petite pause tout en découvrant un abri parfaitement entretenu.

On était pressés, on a même renoncé à la dent du Villard pour aller plus vite et pouvoir avancer un maximum ce matin, avant la perturbation, et tout ça pour aller perdre 45 minutes et une énergie considérable dans une trace inexistante à flanc pourrie, glissante et dangereuse, je ressors de là vidé et démoralisé. et ça juste 1h15 après le départ. Les éléments jouent contre nous et le balisage encore une fois n'aide pas, mais bon il est temps de repartir, et rapidement on a l'impression de se retrouver sur un chemin ressemblant plus à notre objectif, sauf que c'est long, on doit être encore très bas, décidément ce matin ça n'avance pas, je commence à regretter de plus en plus de ne pas avoir fait la dent, je regretterais presque d'être là, mais surtout d'être pressé, quelle idée cette Chamonice, c'est débile, pourquoi ai-je choisi cet itinéraire? Faute de réponse et de motivation, j'imprime un rythme d'enfer dans la montée à la cabane: je veux savoir où on est! 


cascade
cascade dans la Combe des Roches

Il reste à redescendre vers le lac de la Rosière, puis à remonter la vallée homonyme, en délaissant un sentier botanique qui nous rappelle les mauvais souvenirs de la veille. De superbes cascades agrémentent le vallon, et nous atteignons sans encombre le Biol, où le chemin quitte la vallée pour entamer sa remontée vers le col des Saulces, où nous assistons à un combat de marmottes.

En fait j'ai repris la météo sous le Biol: ça va beaucoup mieux: il ne devrait pleuvoir que ce soir à 21h, on a une bonne journée, et surement quelques éclaircies demain matin ... Et là, petit à petit le moral revient, avant même de prendre la météo, je sais pas trop pourquoi, j'ai décidé de profiter de cette chance qu'on avait d'être ici, de voir ces cascades et de tenter cette aventure folle, on verra bien, je pense, et je profite des montées, décidément mon terrain préféré, je papote avec les randonneurs que l'on croise et suis content de maitriser mon rythme et d'être à l'aise.


combat de marmottes
combat de marmottes au col des Saulces

Après un pique-nique au pied du Petit Mont-Blanc, dont nous supposons qu'il doit son nom à ses dalles de rochers blancs, nous poursuivons en direction du col des Mônes, où nous laissons temporairement les sacs pour foncer au sommet du Petit Mont-Blanc, histoire d'impressionner quelques randonneurs qui se trouvent là. Quelques edelweiss accompagnent la montée et on en trouve d'assez beaux au col. Il ne reste plus qu'à redescendre dans la vallée du Doron, aux porte du Parc de la Vanoise, alors que le temps, conformément aux prévisions, se fait plus gris. Le premier refuge où nous pensons pouvoir passer la nuit est au pied du col des Mônes, mais le Roc de la Pêche en plein après-midi (il est 15h15) ressemble plutôt à un café qu'à un refuge. Le temps de remplir les gourdes et nous repartons vers un endroit plus calme, le ciel étant gris mais pas encore trop menaçant. Nous suivons alors le GR55 qui monte calmement mais sûrement vers le refuge de Péclet-Polset, que nous atteignons après une petite pause grignotage juste en-dessous, en même temps qu'un père et son fils qui font un grand tour en Vanoise, et un peu avant la pluie. Ce refuge est très bien agencé et propose de nombreux livres rouges des éditions Guérin, dont la biographie de Patrick Bérhault que je parcours en attendant le dîner. Ces éditions ont l'air de proposer pas mal de bouquins intéressants. Il faudra y voir de plus près à l'occasion, mais pour l'instant nous discutons parcours avec nos compagnons de table en regardant pluie et neige tomber.

Grande Casse
La Grande Casse

Cet après-midi, je me rends vraiment compte que j'ai la forme, à part la foule de touriste en bas de la vallée, tout me plait, je pourrais aller plus vite, j'estime qu'on sera au refuge de Péclet-Polset très tôt, je me prends même à avoir envie de passer le col aujourd'hui, on pourrait être sur les hauteurs de Modane ce soir ... ça serait vraiment bourrin. Je pense beaucoup dans ces montées aux amis, aux collègues, à moi, à ce que je veux faire de mon automne, à plein de monde que je ne citerai pas ici. Et puis Virgile m'interrompt dans mes pensées et mes calculs de temps d'arriver en réclamant une pause; il est vrai que la journée a été longue et difficile, j'ai failli l'oublier!
On a rencontré un Danois qui fait Thonon-Modane, il a fait Modane-Nice l'année dernière, on échange nos façons de randonner, nos objectifs journaliers, notre façon de randonner, nos poids de sacs je suis en confiance, j'aime parler de notre aventure finalement, on a nos chances! Bref le moral est au beau fixe: tout va bien!


Jour 7 (15/08/08) refuge de Péclet-Polset - Modane 400m D+ 19km (en comptant quelques uns des km faits dans Modane!)


refuge de Péclet Polset
Le refuge de Péclet-Polset au petit matin

Comme prévu, il ne pleut pas en ce matin, mais le temps est très maussade. Heureusement, il ne nous reste qu'à achever la montée au col de Chavière, où nous discutons un peu avec un garde du Parc qui nous a montré un bouquetin dans la montée, et qui s'avère avoir passé quelque temps dans le Mercantour. Après être monté sur la petite bosse à l'est du col, où un choucas fait des caprices pour se laisser photographier, nous croisons au col notre Danois vu la veille au refuge. Nous suivons plus ou moins fidèlement le GR55 jusqu'à Modane, en passant quand même par le vallon d'Orgère, où nous arrivons a priori à temps pour faire les courses en cette matinée du 15 août (11h30). Par contre, il n'y a pas d'épicerie sur la grande place. Un plan opportunément placé nous indique la présence d'un supermarché sur le chemin du camping, sous des nuages qui s'apprêtent à pleuvoir d'un instant à l'autre.


L'averse commence pendant les courses, et nous gagnons donc le camping sous une pluie pas trop forte. Sauf que la réception n'ouvre qu'à 17h, et qu'il est midi... Heureusement, le gérant est chez lui, dans la maison en face de la réception et il nous permet de nous installer tranquillement en attendant de venir régler ce soir. Nous montons rapidement la tente et pique-niquons à l'intérieur.

Après avoir laissé passer une grosse averse (et recousu mes chaussures dont le dessus était bien percé. Je savais que des chaussures de raid, même quasi-neuves, allaient souffrir pendant ces trois semaines, mais je suis quand même déçu de les voir dans un état assez lamentable au bout d'à peine une semaine. Millet ne signe pas là une grande réussite), nous profitons d'une accalmie pour aller visiter Modane, avec comme objectif de commencer à écrire les cartes postales de vacances. Mais Modane-ville est complètement morte: même le café de la place de la mairie est fermé l'après-midi du 15 août. Direction donc Modane-gare, alors que la pluie a repris, où là on trouve ce qu'on veut en matière de café, mais pas de carte. On prend quand même thé et bière, après avoir repéré une boulangerie aux Fourneaux où prendre le pain demain matin. Puis nous retournons au camping. Surprise: le marchand de journaux est finalement ouvert. En fait, il faisait juste une longue pause de midi. Nous pouvons donc faire une première fournée de cartes postales, même si le choix n'est pas extraordinaire, de retour au camping.

Pas grand chose à raconter sur ce 15 aout calme, je suis content d'avoir bouclé sans trop de mal la Chamodane, j'ai beaucoup aimé papoter avec le gardien du Parc, j'aimerais revenir en Vanoise un jour ... et puis je suis content de pouvoir brancher mon téléphone dans les sanitaires du camping pour discuter avec mes parents et Fabien ... je ne me rendrai compte qu'après avoir longuement téléphoné que les prises des sanitaires ne sont pas alimentées en électricité! qui a dit boulet?


Jour 8 (16/08/08) Modane - Clarée 2360m D+ - 27km 

Il fait beau lorsque nous descendons aux Fourneaux poster les cartes et acheter du pain. Nous gagnons ensuite le haut du village, passons sous le viaduc de l'autoroute du Fréjus, et commençons à remonter le torrent du Charmaix dans un sous-bois paisible.

J'ai du mal en ce début de montée; mon sac me semble lourd, Virgile a l'air d'avoir mieux profité du repos d'hier que moi, j'ai chaud, je ne bois pas assez, j'aurais envie de faire des pauses mais il faut avancer; j'ai quand même envie de passer le Thabor aujourd'hui ça serait bien!


La montée est sans histoire jusqu'aux ouvrages militaires où nous retrouvons une large piste carrossable et un contingent de randonneurs qui partent comme nous en direction du col de la Vallée Étroite, où nous quittons la région Rhône-Alpes et la Savoie pour PACA et les Hautes-Alpes. De là, nous plongeons dans le vallon du Peyron et atteignons rapidement son lac, avant de remonter vers le col des Méandes en contournant une barre rocheuse. Le col est assez fréquenté par français et italiens qui montent au Thabor depuis Névache. Nous y  pique-niquons un peu en retrait avant d'attaquer à notre tour l'ascension.

Vraiment cette matinée a été difficile! Pour être précis le début et la fin de la montée surtout; au milieu, j'ai pu faire 1 heure ou 2 à l'aise ... En plus la boucle ventrale de mon sac a dos passe son temps à se décrocher, ce qui attaque un peu mon moral, mais heureusement lui tient plus le coup que le physique. Je me rappelle de vieux souvenir dans une montée au Mont Thabor avec Pascal, mes parents et des amis ... dans le brouillard et la neige ... un 15 août justement!



La pluie de la veille était ici neige, et quelques névés frais sont là pour le rappeler, même si le beau temps de la matinée a fait fondre la plupart de ce qui était tombé, ce qui nous vaut de belles pentes boueuses. La montée est raide mais pas trop longue, et après avoir passé la chapelle nous débouchons sur le sommet où nous attend encore une fois un très beau panorama (Vanoise, Ecrins et Aiguilles d'Arves, le tout sous un léger saupoudrage de neige fraiche).

Dôme et Barre des Écrins
Dôme et Barre des Écrins
Cette fin de montée au Thabor a l'air interminable, c'est en tous cas ce que me dit Virgile, et c'est vrai que c'est long, avec toujours de nouveaux ressauts. Mais heureusement, moi ça va mieux je suis à l'aise et nous montons d'un bon pas; je donne le rythme et Virgile suit facilement, nous doublons quelques randonneurs; on dirait que la forme est revenue! Finalement ce n'est pas si long que ça. Une petite pensée pour Céline qui était là le mois dernier, et qui devait comme nous être contente d'atteindre ce superbe point de vue!

Sous le Thabor
Sous le Thabor: le lac Blanc


Nous entamons ensuite la redescente en visant les traces qu'on voit en contrebas dans le vallon sud (même s'il a fallu un peu chercher l'itinéraire au début). Nous arrivons sur un chemin moyennement bien tracé mais qui reste fidèle au poste à travers les rochers et les névés occasionnels le long de la crête sud du Thabor, jusqu'à la Roche du Chardonnet et le col des Muandes. Surprise, s'il y a nettement moins de monde que de  l'autre côté, nous ne sommes pas seuls dans ce paysage assez sauvage. En particulier, un petit groupe monte au Thabor, et nous doublons une randonneuse qui nous confirme que ce matin la neige était bel et bien au rendez-vous sur ces pentes, et que la trace était de ce fait nettement plus difficile à suivre. La fonte nous permet de prendre de l'eau assez haut, avant de descendre vers la Clarée. Nous quittons le GR57 au lac Rond pour passer au lac Long, et décidons de bivouaquer dans un coude de la Clarée, sur un terrain parfaitement plat et pas trop humide malgré la proximité de la rivière.

Thabor
Le Thabor depuis la Roche du Chardonnet

Encore une sacrée journée, avec une matinée difficile mais une après midi agréable pour moi; demain devrait être plus facile. Comme chaque jour, le repos au bivouac se fait apprécier, mais il n'y a pas de doute la forme est là, ça se passe vraiment bien.


Jour 9 (17/08/08) Clarée - col de l'Eychauda 1800m D+ - 24km

La journée s'annonce belle, et pas trop fatigante: a priori, il s'agit juste de rallier le Monêtier-les-bains, où nous prendrions un gîte. Pour l'heure, il s'agit d'abord de monter au lac et au col des Béraudes. La montée au lac est encore une fois efficace.

lac des Béraudes
Le lac des Béraudes

Arrivés là, un couple de randonneurs nous aperçoit, et nous fait signe d'être silencieux: il y a deux bouquetins, un mâle et une femelle, à à peine quelques dizaines de mètres de nous, un peu au dessus. Peu farouches, ils posent un bon moment avant de passer devant nous puis de s'éloigner sur la droite. Nous reprenons alors la montée, suivis par les deux randonneurs, qui suivent le GR57, par un chemin assez escarpé jusqu'au col. De l'autre côté, la descente est également bien aérienne, mais sans réelle difficulté, et nous passons sous la tête de la Cassille pour remonter sur le col du Chardonnet après avoir reperé une marmotte au milieu des cailloux, qui là encore se laisse approcher assez près. Pendant une pause au col, le couple nous dépasse, et nous descendons vers le col de l'Aiguillette avant d'emprunter un chemin de flanc (Chemin du Roy) qui nous conduit au-dessus du Monêtier, que nous atteignons en début d'après-midi, après un repas à 13h sous de petites averses légères.

bouquetin
Bouquetin au lac des Béraudes

C'est aujourd'hui que je commence a réaliser que la marche est devenue réflexe ... pas dans les chemins escarpés ou raides bien sûr, mais sur le plat, les pieds trouvent seul leur chemin au milieu des cailloux, pas que la démarche soit très différente d'avant, un peu rapide peut être, mais c'est devenu naturel, le cerveau calcule ça tout seul maintenant, et je peux encore plus laisser aller mon esprit à d'autres choses: l'estimation de l'heure d'arrivée, ou des réflexions sur moi, sur les gens que je connais, sur ce que je veux faire ce soir ou en rentrant à la fin de ce périple ... ça m'impressionne ce que le cerveau peut faire tout seul, sans que j'y pense.


Nous trouvons facilement le gîte, mais il est vide, et le numéro de téléphone indiqué ne répond pas. Nous décidons alors de ne pas attendre que le propriétaire revienne, car si le gîte s'avère complet, nous risquons de manquer de temps pour trouver un lieu de bivouac acceptable. Le temps de trouver une fontaine pour faire de l'eau, de constater que le temps est un peu gris, et nous repartons en direction du col de l'Eychauda par le GR54 qui remonte le long du torrent de la Selle.

Difficile de se remotiver cet après-midi. Je pose mon sac au gite en me disant que la journée a été courte mais suffisante, quand on décide de repartir, ça me plait quand même car il faut avancer de toutes façons. Par contre j'ai tendance à prendre un rythme très lent alors que Virgile a repris le rythme de croisière, non il n'y a plus la motivation, j'ai juste envie d'avancer doucement et de voir où on arrive ce soir, je dis à Virgile que je risque de trainer toute la montée quand pendant la première demie-heure il me précède d'une petite distance. Le moral est bon, je suis plutôt bien, mais lent et sans grande motivation pour accélérer. Puis finalement le train-train s'installe et Virgile et moi retrouvons un rythme similaire, je repasse devant même, talonné comme d'habitude par Virgile.


Il pleuviote un peu par moments, et arrivés aux Bachas, où arrive un télésiège emprunté en été par des VTTistes, nous décidons de nous accorder thé et bière au bar à côté du télésiège pour laisser passer une averse. Ça fonctionne plutôt pas mal, et nous pouvons remonter encore d'une centaine de mètres et monter la tente au sec sur un replat un peu au dessus de la piste qui monte au col de l'Eychauda (2250m). Une petite averse pertubera à peine notre dîner, alors que nous voyons passer un randonneur qui avait probablement lui aussi repéré ce point potentiel de bivouac, mais arrive un peu tard...

Jour 10 (18/08/08) col de l'Eychauda - col de l'Anon 1650m D+ - 35km 

panorama de la Cucumelle
Panorama de la Cucumelle: Aiguilles d'Arves et Grand Galibier

La nuit (froide et humide) a lavé le ciel, mais le soleil n'est pas encore levé, et il fait relativement frais tandis que nous achevons la montée au col de l'Eychauda: on supporte même les gants. Nous continuons ensuite vers le col de la Cucumelle, sur la crête de Roche Gauthier où nous rejoignons enfin le soleil. Il ne reste plus qu'à monter à la Cucumelle elle-même, pour jouir d'une très belle vue sur les Écrins et l'Oisans (Thabor, Ecrins, Aiguilles d'Arves, ...), avant de revenir à l'Eychauda et d'entamer la descente sur Vallouise. Nous retrouvons bien vite le chemin emprunté cet hiver sous la neige et croisons la foule qui monte au lac de l'Eychauda depuis Chambran, petit hameau qui a plus de charme en hiver, isolé par la neige, qu'en été. La descente le long du torrent de l'Eychauda nous montre qu'on est bien entré dans le sud: la végétation y est plus basse, parfois à la limite de la garrigue. Le chemin vers Vallouise n'offre aucune difficulté, à part un défaut de balisage lorsqu'il faut quitter la piste pour un petit sentier, mais une randonneuse locale nous confirme que c'est la marche à suivre, avant d'ajouter que ça fait bien deux ans que la piste est ouverte et que tout le monde se perd à cet endroit, mais que personne n'a encore jugé utile de rebaliser.

au sommet de la Cucumelle
Virgile et Ludo au sommet de la Cucumelle, sur fond de glacier de Monêtier et des Agneaux

La descente sur Vallouise est longue et chaude après un départ glacial ce matin. Je vois l'heure qui défile, on a pourtant un bon rythme, mais du col de l'Eychauda a Vallouise, il y a une sacrée trotte. J'essaye de maintenir un rythme élevé car j'ai peur d'arriver après 12h et de retrouver les magasins fermés; au final, on arrive juste avant midi, et la supérette ne ferme que le soir ....


Arrivés au centre du village, nous hésitons à aller à la supérette, et décidons de continuer comme prévu sur La Casse, où la galerie commerciale recèle, outre une autre supérette, un magasin de sport. Ludo y cherche en vain à remplacer sa boucle de ceinture ventrale de sac à dos qui donne des signes de faiblesse, et j'y trouve des semelles intérieures qui vont pouvoir compenser la perte d'amorti de mes chaussures. Nous achetons ensuite le ravitaillement puis traversons la Gyronde en direction de la maison du Parc des Écrins. Nous quittons rapidement la route pour une large piste, mais contrairement à ce qui est indiqué sur la carte, elle ne se décide pas à monter. Après le pique-nique, nous trouvons néammoins un itinéraire VTT dirigé dans  la bonne direction, et nous nous retrouvons rapidement au hameau des Alberts, après que le chemin ait contourné une propriété qui semble avoir quelque peu bouché l'ancien passage de manière semi-légale. Aux Alberts, une fontaine nous permet de prendre de l'eau, mais aussi de faire vaisselle et "lessive", ou plutôt rinçage des vêtements. Ça n'avait pas été fait depuis Modane, et ça commençait à devenir urgent. Juste avant de repartir, nous remarquons que la fontaine se tarit: au dessus de nous, des employés de la DDE s'apprêtent manifestement à intervenir sur les canalisations, nous sommes passés à temps. Nous prenons la route en direction des Prés, puis un petit chemin qui suit le ruisseau des Prés en dessous du Prey d'Aval avant de remonter sur le Prey d'Amont où nous prenons la piste qui mène au col de la Pousterle. Sur la piste, une voiture manifestement en panne, et un conducteur qui n'a pas l'air heureux de ce qu'il entend dans son téléphone portable, il va peut-être avoir du mal à redescendre à Vallouise en voiture ce soir... Enfin bon, nous continuons. Le col est bourré de monde en cette belle journée de vacances, et nous ne nous attardons que le temps d'observer le Pelvoux et la barre des Écrins.

La montée au col s'est encore faite à un rythme élevé malgré les sacs bien lourds ... mais bon on tient tous les 2 le même rythme et je suis content d'avancer. J'ai la forme (normal, ça monte!). Un petit coup d'œil à la vue avant de descendre sur une piste qui nous fait penser à Nico(D), qu'est ce qu'il n'aimerait pas: elle est plate, monotone, quand même avec quelques cailloux pour casser un peu le rythme, large et forme d'interminables lacets qui ne se décident pas à descendre sérieusement.


Toujours sur une piste, nous descendons au torrent du Fournel que nous franchissons sur une petite route, avant de le suivre quelques centaines de mètres en descendant sur un chemin étroit. Ensuite, nouvelle piste qui s'élève un peu et que nous quittons pour un chemin balisé, mais apparemment peu emprunté, qui coupe quelques lacets, à travers champs de ronces et d'orties. Mais quand il revient sur la piste, le balisage indique de tourner à droite, c'est à dire de descendre! Nous lui faisons un peu confiance, mais quand la pente de la piste se raidit un peu sans qu'un sentier de montée n'apparaisse, nous préférons faire demi-tour et prendre la piste dans le sens de la montée (après avoir essayé, puis abandonné d'autres traces de balisages toutes contradictoires les unes avec les autres, mieux vaut essayer de trouver sur la carte où nous sommes). Nous retrouverons le balisage quelques lacets plus haut, pour prendre le sentier qui remonte les gorges du torrent de Crouzet avant de franchir le torrent et de se poursuivre à flanc jusqu'à la piste du col d'Anon, grande prairie bien plate où nous plantons la tente.

Cette fin de montée  jusqu'au torrent devient difficile: la journée a été longue, on  accéléré plus bas sur la piste pour être sûrs de retrouver le chemin rapidement, et les sacs sont tout de même lourds. Le torrent nous permet de nous arrêter un peu pour refaire de l'eau. Le final est enfin agréable, à flanc et nous permet de terminer cette dure journée en douceur, le col d'Anon approche. Cette journée m'a quand même bien échauffé les pieds, mais je sais que tout sera oublié demain matin après une nuit de récupération. J'estime que nous avons atteint la moitié de la Chamonice (ou presque), et cela me donne un moral d'enfer; j'ai même un peu augmenté le rythme dans les dernières montées de la journée sous l'effet de la bonne nouvelle!


Pendant le dîner, nous sommes surpris par la recrudescence des mouches, jusqu'à ce que Ludo, levant la tête, aperçoive 5 chevaux qui se rapprochent dangereusement de la tente. Si les plus grands n'insistent pas quand on leur intime l'ordre de déguerpir, l'un des deux plus petits se montre particulièrement curieux, et il faut se montrer un peu menaçant pour qu'il condescende à s'éloigner avec le reste du groupe... en laissant les mouches, grrr.

Jour 11 (19/08/08) Col de l'Anon - Dormillouse 920m D+ - 15km

Pour aujourd'hui, les prévisions météo prévoient un temps se couvrant dans l'après-midi, avant des pluies le soir, demain devant être beau. Nous avons donc une option de dormir au gîte de Dormillouse plutôt que d'essayer d'avancer le plus possible vers Embrun, sachant que nous sommes largement en avance sur nos prévisions de marche. Nous descendons tranquillement du col d'Anon par la piste et le GR50/541 jusqu'aux Aujards, où nous les quittons dans un lacet pour prendre le chemin de Dormillouse qui reste à flanc, en hauteur par rapport à la vallée (Dormillouse est indiqué à 5h30 de marche tout de même, il nous faudra au minimum 3h, ça fout un coup au moral!). Le balisage n'est pas fameux, et nous tombons rapidement dans un champ. Plutôt que de faire demi-tour alors que nous ne sommes pas encore trop loin du vrai sentier, nous continuons à monter à travers champs en espérant retomber dessus. Mais nous tirons trop à gauche, et il faut se rendre à l'évidence, nous avons perdu le chemin. Un coup d'œil à la carte nous indique que ce dernier passe au dessus de la barre rocheuse qui se dessine à notre gauche: une bonne montée plus ou moins pleine pente finit par nous remettre sur les bons rails, juste au dessus des Garcines alors que le temps empire franchement.

cascade
cascade au-dessus de Dormillouse

La dépression du soir semble nettement en avance, il n'est même pas sûr que nous puissions arriver secs à Dormillouse. Enfin, nous sommes quand même de nouveau sur le bon sentier, et cette fois-ci il n'y a pas de problème majeur pour suivre le balisage. Nous laissons en dessous de nous le village des Viollins, perdu dans la vallée au milieu de la forêt et continuons sur un bon chemin de flanc à travers prairies et quelques petites barres rocheuses. Nous pique-niquons sur les hauteurs de Dormillouse.

Entre la loose topo qui ne nous a pas coûté beaucoup de temps, mais beaucoup d'énergie pour remonter pleine pente et les passages un peu expo sur la fin de la traversée, que Virgile n'a probablement pas vu, mais qui m'ont demandé plus d'attention, et un peu de crispation avec le gros sacs, je suis fatigué et j'espère que le pique-nique me remettra d'aplomb, enfin si nous continuons:


Le temps s'est un peu remis, mais les crêtes sont encore dans les nuages, en particulier dans la direction où nous sommes censés aller. La réponse à la question "Est-ce qu'on s'arrête?" est donc moins claire que tout à l'heure: il y a probablement la place pour passer à peu près sec, même si c'est loin d'être garanti. Finalement, nous optons pour l'arrêt. Le plafond nuageux est quand même très bas, et même si on passe, ce sera avec le stress de se trouver pris dans la pluie et le brouillard vers le col. Reste à voir s'il y a de la place au gîte. C'est le cas, mais uniquement dans la grande tente à côté, ce qui n'est pas un problème, même si cela fait hésiter un peu plus Ludo sur la conduite à tenir. Finalement, nous allons poser nos sacs sous la tente, et après avoir lu les panneaux indiquant que le temple et l'école attenante, le gîte actuel, doivent beaucoup au pasteur suisse Félix Neff qui au début du 19ème siècle a beaucoup parcouru ces vallées pour ranimer une foi protestante mise à mal par la Révolution, nous descendons au parking puis remontons par le chemin des cascades. Seul village habité de manière permanente dans le Parc des Écrins, Dormillouse semble être un bon point de chute pour monter des expéditions dans le sud-est des Écrins, il faudra creuser la question à l'occasion.

cascade
cascade en-dessous de Dormillouse

En attendant, nous voici de retour au gîte. Le temps est de nouveau très gris, mais il ne pleut pas, ce qui ne plaît pas à Ludo: on aurait pu avancer au lieu d'être là à prendre une bière en attendant l'heure de la douche. La tenancière du gîte organise en effet les tours de douche par groupes de randonneurs, ce qui est au bout du compte assez efficace. L'atmosphère se raffraîchissant sérieusement par manque de soleil, nous quittons la terrasse pour nous regrouper dans la salle commune du gîte un peu avant le dîner, qui s'ouvre sur un original et très bon kir à la lavande, et propose un succulent porcelet aux fines herbes et un intéressant plateau de fromage, pendant que la pluie se décide enfin à tomber. Nous gagnons au pas de course la tente dans un noir complet (pourquoi n'avons nous pas pensé à la frontale?).

cascade
cascade en-dessous de Dormillouse

J'aurais préféré qu'il pleuve tôt: j'aurais été content d'être au gîte, plutôt que de me demander si nous avons fait le bon choix: prendre un gîte pour dormir en tente ... certes une tente plus confortable que la nôtre mais bon ... Je pense à demain, j'aimerais bien faire le Tuba, petit sommet à 3000, il y a une boucle pour l'atteindre par un vallon sans balisage, mais nous décidons petit à petit de monter par le chemin balisé au col des terres blanches: nous ferons l'aller-retour au sommet seulement si nous avons la météo avec nous et le temps d'y aller.


Jour 12 (20/08/08) Dormillouse - Embrun (en 10h30!) 2330m D+ - 38km

crête de Dormillouse
Dormillouse et sa crête depuis la Combe des Oules

Comme prévu, il fait beau ce matin. Nous prenons le petit-déjeuner en même temps que les propriétaires du gîte avant de prendre congé. Après une courte descente en direction du parking, nous obliquons rapidement pour remonter le torrent des Oules et ses cascades. Nous débouchons sur une vaste prairie sous le Tuba, que nous quittons rapidement pour monter vers l'est en direction d'une crête un peu plus rocheuses. Après avoir passé d'autres cascades, nous débouchons dans un vallon suspendu enserré entre deux crètes, que nous remontons jusqu'au col des Terres Blanches, qui se fait un peu attendre, mais finit par arriver. Nous décidons que le Tuba est un peu trop loin, et entamons la descente du col le long du torrent de la Bruyère, dans un paysage assez sévère.

vallon suspendu
Le vallon suspendu menant au col des Terres Blanches
Vraiment, j'ai été enchanté par la beauté du paysage dans cette montée au col des terres Blanches, il fait beau, le paysage est splendide, et le cheminement de l'itinéraire est parfait. On se perd un peu, mais pas trop car le chemin est assez bien balisé, ça aurait été moins bien avec la météo de la veille même si cela nous aurait quand même fait gagner du temps. Dommage que le Tuba soit si loin, on reviendra! Cette journée s'effectuera à un rythme régulier et soutenu, il faut dire que ce sera au final une des plus grosses journées de ce séjour.


La remontée au col des Tourettes est également un peu rocheuse, mais le chemin bien tracé, et nous arrivons au col sans encombre. Une descente rapide, mais qui fait un large détour pour éviter un pierrier nous amène au torrent du Rabloux que nous franchissons et descendons un peu pour trouver, à hauteur d'une ferme et d'un pré où nous pique-niquons, le chemin de montée vers le col de Reyssas. Le chemin monte bien, et nous aussi, même si nous ne parvenons pas à rattraper deux randonneurs que nous suivons de loin pendant une bonne partie de la montée. Nous les rejoignons au col, où nous bavardons un peu, et l'un d'entre eux nous suggère de pousser jusqu'au Mont-Guillaume pour descendre tout le torrent Ste Marthe et arriver sur Embrun.

Cette journée est vraiment superbe, j'aime ces vallons très sauvages! le col des Tourettes a été litéralement avalé, et après de petites difficultés digestives dans la demi heure après le repas, je me suis trouvé en forme olympique! arrivé au col, je n'ai envie que d'une chose: être à Embrun ce soir pour marquer cette journée d'un petit exploit ...


Comme la journée commence à être un peu longue, nous préférons rester sur le sentier balisé et descendons le torrent de Reyssas où de nouvelles cascades nous attendent. Nous rejoignons un chemin de flanc au Clos l'Herbous qui nous mène au Clos Bouffier où nous attend le GR50, que nous suivons jusqu'à une piste où se situe la dernière montée de la journée, avant une longue portion plate, puis une descente par une piste de VTT assez pêchue, avant de retrouver le GR50 sur une piste, puis de finir la descente sur Embrun par le torrent Ste Marthe. Nous aboutissons dans un lotissement dont nous extrayons tant bien que mal avant de trouver le camping des Tourelles.

cascade
Cascade du torrent de Reyssas

Ce dernier est muni d'un sympathique bar où nous pouvons siroter une bière en compagnie d'un guide de haute montagne assez désabusé par le comportement d'un de ses clients qui l'avait engagé pour la traversée du Pelvoux sans rien connaître à la montagne, et qui apprécie en connaisseur le parcours effectué jusque là. Par contre, le bloc sanitaire du camping est un peu vieillot. Apparemment, le propriétaire a préféré investir dans une piscine, ce qui est un peu dommage. Je constate par ailleurs les effets de mes nouvelles semelles, après cette longue journée ponctuée d'une longue descente. Côté positif, je n'ai pas eu mal du tout aux articulations de toute la journée, contrairement aux descentes des jours précédents. Côté négatifs, une grosse ampoule au gros orteil gauche, et surtout une ampoule bien profonde au petit doigt de pied droit. Il va falloir tenir un peu compte de ça ces prochains jours.
A l'arrivée au camping, nous sommes bien fatigués mais contents de l'exploit accompli et je suis confiant pour les deux jours suivants, objectif: atteindre Jausiers.
dans la descente
Virgile dans la descente du torrent de Reyssas

Jour 13 (21/08/08) Embrun - lac de Ste Marguerite 1700m D+ - 20km

Une fois n'est pas coutume, nous prenons le temps de faire une grasse matinée (réveil vers 7h45, départ après 9h) puisque de toute façon il nous faut faire des courses et donc attendre que les magasins soient ouverts. Nous arrivons donc à un supermarché sur la N94 peu après 9h, et après un ravitaillement express, nous prenons le pont sur la Durance avant de nous engager sur une plus petite route, puis un chemin qui mène à l'église de Baratier. De là, une piste suit d'un peu haut le torrent des Vachères, avant que nous ne prenions un chemin qui monte pleine pente à côté d'un torrent secondaire. Nous nous permettons une pause au milieu de cette montée particulièrement raide, avant d'atteindre le belvédère de Plat-Aiguille, mais la vue annoncée est un peu décevante: si on voit bien Embrun et l'est de la vallée, le lac de Serre-Ponçon est bien moins visible qu'il ne l'était la veille. De là, une grande piste à peu près plate, dite "la grande rocade", nous mène aux abords de la station des Orres. 

Suite aux courses et à la journée de la veille, les sacs et les jambes sont lourds, le bas de la montée est très dur pour moi, surtout que je me suis permis le luxe d'acheter raisin et petits gâteaux que nous mangerons après quelques centaines de mètres de dénivelé. Puis petit à petit on rentre dans le rythme, tout va mieux, et on mange les raisins, mon sac s'allège.


Nous tournons alors sur un chemin qui commence par monter fermement (et sur la digestion du pique nique, c'est assez dur!), avant de rester plutôt à plat. Son tracé ne correspond pas complètement à la carte, mais la direction générale est plutôt bonne, donc nous le suivons quand même. En fait, nous sommes sur le chemin parallèlle qui n'est pas balisé et légèrement en dessous du vrai chemin, que nous apercevons effectivement un peu plus haut à l'occasion d'une traversée de champ. Le temps de monter dessus et de faire quelques dizaines de mètres, nous nous apercevons qu'il est interrompu par un éboulement au passage d'un ruisseau. Il faut se résoudre à ce que nous avions voulu éviter: descendre sur la piste en contrebas et rejoindre celle qui mène des Orres au lac Ste Marguerite (bonus: 100m de dénivelé). À mi-montée, nous bifurquons vers la source de Jérusalem, située sur notre chemin original, mais juste de l'autre côté de l'éboulement, dans l'espoir de prendre de l'eau, mais une des sources est entièrement captée et l'autre est une résurgence qui sort au milieu d'une paroi et est donc peu accessible. Nous rejoignons donc bredouille le chemin de montée au lac Ste Marguerite et filtrons de l'eau des sources qui parsèment le vallon de l'Eissalette juste sous le lac. Bien chargés en eau, nous avons un peu de mal à doubler les promeneurs dans la dernière montée vers le lac, où nous arrivons relativement tôt. Mais après la journée d'hier, un peu de farniente avant de monter la tente pour attendre le départ des derniers groupes ne fait pas de mal. 

lac Sainte Marguerite
Le lac de Sainte-Marguerite

Aujourd'hui j'ai vraiment remarqué qu'il y avait une limite au poids du sac que je pouvais supporter: par deux fois (à la sortie d'Embrun et après le plein d'eau) je me suis senti scotché au sol, alors que Virgile me lâche, je monte au mental et prends mon mal en patience; pourtant il me suffit de perdre un petit kilogramme et je caracole en tête et fais la course avec les randonneurs légers.

En arrivant au lac j'avais envisagé de monter au col de l'Ane, peut être sans les sacs, mais suite a nos quelques looses et comme Virgile avait l'air autant fatigué que moi, nous attendons et nous reposons au lac, ça fait du bien aussi!


Quelques baigneurs intrépides font une ou deux brasses. Pendant ce temps, un troupeau de moutons, conduit par une bergère à cheval se rapproche du lac pour boire. Ils restent à l'autre bout du lac par rapport à nous, mais deux patous se détachent pour venir quémander aux touristes de la nourriture. S'ils n'ont aucun succès auprès de nous malgré des yeux de chat botté dans Shrek, d'autres groupes les nourrissent largement, jusqu'à ce qu'ils se fassent rappeler à l'ordre d'un aboiement impérieux du chef patou et regagnent le troupeau qui s'éloigne maintenant en remontant vers la crête opposée. Il commence à être temps de planter la tente, et nous trouvons un terrain plat et abrité du vent juste en dessous du lac.

l'Aupillon
Coucher de soleil sur l'Aupillon


Jour 14 (22/08/08) lac de Ste Marguerite - Jausiers 1200m D+ - 24km

pierre à fossile
Pierre à fossile dans la montée à l'Aupillon

Il fait toujours très beau. Une bonne montée vers le col anonyme sous l'Aupillon nous met bien en jambe. Nous laissons les sacs pour finir la montée à l'Aupillon en aller-retour rapide. Le sommet est assez rocheux, mais avec une trace bien faite. Une fois revenu au col, nous descendons en direction des Abreuvoirs, avant de traverser les pierriers en direction de la crête est de l'Aupillon. Je préfère l'aborder plus tôt que Ludo, au prix d'un passage un peu plus merdique mais nettement plus court dans le pierrier.
les Écrins
Les Écrins (Ailefroide, Pelvoux) depuis l'Aupillon

Pendant que je suis l'itinéraire que nous avions repéré de loin (et qui effrayait un peu Virgile car cela avait l'air d'une grosse remontée de pierrier), Virgile part au dessus de moi; je le regarde un peu: il doit savoir ce qu'il fait il est plus à l'aise que moi dans ce terrain; moi je vais continuer sur l'itinéraire prévu et ça va bien se passer! Pendant me remontée de pierrier (qui se passe étonnement bien, seulement quelques pierres roulent) j'entends Virgile pester et se plaindre je le regarde et ai l'impression qu'il est en mauvaise posture, je reste un peu là à regarder et me poser des questions; mais il n'y a rien à faire, je ferais mieux de monter sur la crête: Virgile connaît son affaire ... mais à sa place je descendrais de quelques mètres. Finalement je monte en essayant de me concentrer sur mes pas; ça se passe vite et bien, et je ne vois plus Virgile, mais au moins il ne peste plus! J'atteins la crête assez facilement , puis attends quelques minutes qui me semblent très longues: j'espère qu'il n'a pas de soucis et qu'il a juste choisi un itinéraire plus long ... mais je suis soulagé de voir arriver Virgile me disant qu'il est tout de même satisfait de son itinéraire; on ne doit pas avoir les mêmes critères ...

crête de la tête de l'Aupet
La crête de la Tête de l'Aupet vers le col des Orres


La crête elle-même est rocheuse, mais sans réelle difficulté, d'autant plus que des traces de sentier la ponctue régulièrement aux points un peu délicats. Nous gravissons donc sans souci la tête de l'Aupet avant de continuer un long parcours de crête jusqu'au col des Orres, d'où nous descendons sur le "sentier horizontal", long sentier de flanc pas si horizontal que ça que nous suivons jusqu'à son terme, malgré quelques vaches sur le passage au début.

Je redoutais un peu cette crête qui me faisait envie, mais je craignais d'y avoir peur, avec le gros sac et mon apréhension pour le vide; au final ça se passe bien, il y a certes quelques passages que j'ai trouvé difficiles, mais globalement il n'y a pas eu trop de soucis, les difficultés se contournent facilement; il faut aussi dire que nos sacs se sont allégés depuis hier!


On arrive après une longue traversée au bout de ce sentier: la cabane ONF de Belmont. C'est là que commence la descente sur Jausiers, ponctuée cependant d'une belle petite remontée au passage du ruisseau des Sanières. Nous arrivons sur les hauteurs de Jausiers, mais Ludo déniche un chemin de descente direct sur le centre ville via le petit oratoire qui surmonte le village, et nous arrivons sur la place où se trouve un petit marché aux saveurs. Le temps d'aller installer la tente au camping situé à proximité, et d'y prendre une douche, et nous retournons sur place, pour acheter saucissons aux figues et au beaufort, ainsi qu'un énorme pain au sésame, qui durera en fait jusqu'à la fin de la rando, et quelques pâtisseries à base de miel, figues, amandes et noix. Nous complétons les provisions à la supérette du coin, allons les poser au camping et revenons en centre ville pour une opération bière et cartes postales qui nous permet d'atteindre tranquillement l'heure du dîner. Nous constatons alors que nos voisins hollandais sont partis pour faire un barbecue. Nous craignons le pire pour la nuit, mais tout se passe en fait très bien.

La journée a été un peu éprouvante, mais ça s'est assez bien passé les quelques averses de l'après-midi ne nous ont pas vraiment gênés. La descente a fait ressortir les douleurs aux pieds, mais vu que l'on s'est posés au camping à 15h, on a le temps de bien récupérer. Je suis content de notre avancée, et je profite du camping pour recharger un peu mon téléphone et appeler plein de monde. Finalement ça se passe bien, ce n'est pas si dur que ça et je suis certain qu'on arrivera en avance, même si je ne sais pas encore de combien de temps.

coucher de soleil
Coucher de soleil à Jausiers

Jour 15 (23/08/08) Jausiers - refuge de Vens 2270m D+ - 32km

Au réveil, le ciel est très couvert, mais cela ne m'inquiète pas trop et ça se dégage vite; une dure journée nous attend: je veux atteindre le vallon de Salso Moreno, voire les lacs au dessus; je suis même convaincu que nous irons peut être plus loin .... atteindre le dernier lac sous le pas de Morgon aujourd'hui serait bien!

Nous quittons Jausiers par la route du col de la Bonnette, "la plus haute route d'Europe" (même si ce titre n'est obtenu qu'en faisant monter la route au-dessus du col), annoncé pour les cyclistes courageux à 24km de montée. C'est aussi la route qui pénètre dans les Alpes-Maritimes et file sur Nice, dont nous trouvons pour la première fois mention sur un panneau indicateur: un peu plus de 140km si on suit la route. Nous la quittons cependant assez vite à hauteur des Bellarots pour prendre une piste moins fréquentée. Nous reprenons la route au niveau du hameau des Buissons, avant de la quitter définitivement à Lans, joli petit hameau perché, puis on monte aux Gréoux. Là, une bonne piste en sous-bois un peu monotone nous amène rapidement au lac des Sagnes où nous contemplons le reflet de la Tour des Sagnes et des autres montagnes, avant de prendre un petit chemin à travers la tourbière à l'est du lac.

Cette approche du lac nous a demandé de marcher très vite: le chemin était très long et très monotone, si nous n'accélérons pas il y a de quoi y passer la journée et se déprimer à ne pas avoir avancé, pourtant mon sac me semble lourd; j'essaye de changer sa position ... j'ai un peu mal au dos et je ne suis pas bien, mais bon il faut avancer alors on change encore le serrage du sac, raccroche cette #@#@$# boucle de ceinture et je force le pas comme si de rien était ... c'est la bonne tactique: ça va mieux et on avance bien.


Après une courte montée, nous débouchons dans le vallon de Pelouse, belle prairie sauvage coincée entre la Tour et la montagne de Pelouse où paissent quelques chevaux. Au milieu du vallon, nous apercevons la marque d'entrée dans le Parc du Mercantour: Ludo commence à arriver en terrain archi-connu. La montée se fait tranquillement, jusqu'au raidillon final vers le col de Pelouse, notre point d'entrée dans les Alpes-Maritimes: il ne reste plus qu'à traverser tout le département et nous serons arrivés.

Panorama de la cime de Pelousette
Panorama de la cime de Pelousette: Tête carrée, Montagne  et Vallon de Pelouse

Du col, nous dominons la descente du col de la Bonnette, où nombre de cyclistes passent à la montée comme à la descente pendant notre pique-nique. Ensuite, il s'agit de monter sur la crête jusqu'à la cime de Pelousette et son fort en ruine(à la cime, un peu de mo

nde et une superbe vue: Ubaye, Hte Tinée, Mounier, Trou de l'Ane, ...). De là, une ex-route militaire nous redescend au col des fourches, juste au-dessus du camp homonyme d'où partent les randonneurs qui montent à la cime de Pelousette.

vallon de Gipières
Vallon de Gipières et Salso Moreno

Devant nous s'étale le Salso Moreno et son étrange paysage de dolines ocres. C'est le moment de rejoindre le GR5 pour quelques centaines de mètres... mais dans le sens Sud-Nord. Nous le quittons cependant bien vite pour prendre plein est à travers le Salso Moreno une montée faite de court ressauts raides et de replats. Nous passons aux lacs de Morgon, où nous marquons une pause avant d'attaquer la montée finale du Pas de Morgon, menée là encore à un rythme soutenu.

Quand on arrive aux lacs, il est 16h tout de même. Encore une fois on arrive au bivouac prévu pour le goûter, on décide donc de pousser jusqu'aux lacs de Vens.


lac de Morgon
Un des lacs de Morgon
Du pas, un joli parcours de crête amène au col du fer, à la frontière italienne. Il n'y a plus qu'à passer au collet de Tortisse, avec ses impressionnantes Aiguilles et son arche de pierre dans la descente sur le refuge de Vens. Comme nous avons du temps, et que le réglement du Parc nous oblige à attendre 19h pour monter la tente, nous nous autorisons bière et tarte à la myrtille au refuge, avant de faire le plein d'eau et de commencer à monter.

Ludo préfère en effet passer la nuit un peu en hauteur plutôt que près des lacs de Vens, dont il sait que les rives sont un lieu de bivouac assez fréquenté, surtout un week-end d'août. Avec des sacs pleins d'eau, nous sommes assez enclins à nous arrêter au premier replat convenable. De toute façon, la rocaille classique des crêtes du Mercantour commence peu après, il ne sert à rien d'aller trop haut. Nous attendons tranquillement 19h au soleil, avant de planter la tente. Juste après surgit un groupe de 6 personnes, dont certaines manifestement très déçues de devoir chercher un autre emplacement plus haut.

Encore une belle et grosse journée avec des sacs bien chargés, heureusement nous avons beaucoup bu ce qui a tellement allégé nos sacs que nous avons fini nos gourdes juste avant la dernière descente ... on a failli manquer d'eau.

cime de Vens
Coucher de soleil sur la Cime de Vens

Jour 16 (24/08/08) Refuge de Vens - Vallone di Barbacana 1550m D+ - 14km

Il a fait très froid cette nuit, et nous l'avons senti malgré les duvets et la tente. Nous en avons confirmation en faisant le petit-déjeuner: l'eau qui restait dans les assiettes après la vaisselle a gelé pendant la nuit, les soudant l'une à l'autre. Nous partons d'ailleurs en collant et polaire, d'autant plus que dans ce vallon étroit, le soleil n'est pas encore levé.

L'itinéraire de la brèche Borgognio a été débalisé, pour des raisons confuses, mais le chemin existe toujours à travers le pierrier, et est jalonné de cairns. Il faut quand même faire attention à prendre à droite au bon moment pour ne pas se retrouver au pas de Vens, après avoir admiré quelques chamois, trop lointains pour qu'on puisse les photographier (d'autant plus que le chamois est notablement plus farouche que le bouquetin, et n'attend en général pas que vous sortiez votre appareil photo). La montée finale dans les cailloux est assez rude mais courte, et nous débouchons au pluviomètre de la brèche, qui mérite bien son nom: c'est une toute petite déchirure dans la crête.

La descente s'effectue bien entendu aussi dans les rochers, guidée par quelques cairns. Par contre, nous sommes sur un versant sud, et il commence à faire plus chaud, nous pouvons repasser en short (la polaire ayant été abandonnée dans la montée). Après une petite discussion avec des randonneurs qui montent pour les aider à déterminer le meilleur itinéraire possible de monter (il faut semble-t-il passer plus à gauche (en montant) de la brèche que nous ne l'avons fait), nous poursuivons la descente vers les lacs de Ténibre et les lacs Varicles (oui, je sais c'est un peu bas et cette petite erreur nous vaudra un petit 100m de dénivelé supplémentaire ... bonus encore) pour contourner les barres rocheuses qui protègent la montée au Ténibre. Je ne me sens pas super en forme au début de la montée, et comme j'en fais part à Ludo, il me signale que lui non plus.

Viso
Vue du Ténibre: Viso, Grand Paradis(?)

En ce qui me concerne, à mesure que les calories ingérées lors de la pause aux lacs passent dans le sang, ça va de mieux en mieux, et la montée un peu technique (d'autant plus que nous ne sommes pas toujours sur l'itinéraire officiel et qu'il faut donc parfois se farcir quelques vires un peu scabreuses) se passe assez bien. Par mesure de précaution, nous micro-purifions toute notre eau une fois arrivé au sommet du Ténibre, même s'il est nettement plus probable que c'est le froid de la nuit plutôt que l'eau du refuge qui nous a un peu entamé.

Difficile de monter avec un gros sac et des nausées, mais heureusement après 15 jours, la marche est devenue une habitude, et en se forçant à un rythme un peu plus faible qu'à notre habitude, ça monte tout seul, et finalement ça va un peu mieux, à croire que la marche est devenu notre remède à tous les maux (aidée un peu par la nourriture tout de même ...).


La redescente commence par une mini loose topo, mais Ludo connaît suffisamment bien le terrain pour réagir à temps. Nous nous retrouvons rapidement dans le bon vallon de descente, où nous croisons deux italiens à qui nous indiquons l'itinéraire de retour en Italie via le Ténibre, et arrivons sans encombre, par le pas de Rabuons, au-dessus du grand lac du Cimon, où nous pique-niquons à l'ombre d'un gros rocher. Nous nous dirigeons ensuite vers la rive est du lac de Rabuons, d'où nous entamons bientôt la montée vers le pas du Corborant, encore une fois au milieu d'un gros pierrier. Il commence à faire froid, venteux et le ciel se couvre; je croyais qu'on était dans le sud en août! Une fois au pas, nous décidons qu'il ne fait pas assez beau pour monter au Corborant lui-même et basculons directement en Italie.

lac de Rabuons
Ludo devant le lac de Rabuons (pendant qu'il n'est pas encore défiguré par les tractopelles du CG 06)


Comme Pascal nous a signalé que lui et Valérie avaient eu un peu de mal à monter le pas par ce versant, nous appréhendons un peu la descente, sur les lacs de Lausfer, mais après un début de descente droit sur les lacs à travers le pierrier (150m de denivelé en pierriers instable, raide et donc peu commode), j'aperçois une trace qui prend très à gauche du pierrier mais semble ensuite repiquer vers les lacs. Je convainc Ludo d'aller y voir de plus près, et nous tombons sur un bon sentier qui nous emmène tranquillement à bon port.

Il ne reste plus qu'à descendre vers le vallon de Barbacane, puis à commencer la remontée sur le chemin du pas de Barbacane. Nous trouvons assez vite un replat herbeux au milieu d'un grand champ de cailloux, et comme Ludo n'est toujours pas bien, nous ne perdons pas trop de temps à chercher le bivouac idéal. Une petite sieste plus tard, ça va mieux, mais nous prenons la précaution de nous coucher plus chaudement habillés que la veille.

Il fait très froid cet après midi et je ne me suis pas trop remis de mes problèmes d'estomac; toute la journée j'ai quand même eu une forme respectable, avec même un grand mieux dans la montée au pas du Corborant, mais sous les lacs du Lausfer patatras, je suis vidé, je ne me sens pas bien, en arrivant au bivouac, je n'ai que 2 envies: mettre tous mes vêtements et dormir dans la tente! Je n'écrirai pas de compte rendu ce soir ... ce qui me rassure c'est que Virgile me dit qu'il fait froid, je suis peut être malade mais pas tant que ça, espérons que ça soit passé demain; le repas chaud est quand même très réconfortant, et je passe une nuit correcte: je sais maintenant comment m'habiller  pour avoir chaud dans mon duvet (une veste très légère suffit en général, mais la polaire peut être utile si il se met à geler). Il fait très froid la nuit aussi mais il ne gèle pas.

Jour 17 (25/08/08) Vallone di Barbacana - Isola 2000 1730m D+ - 24km

La nuit a été fraîche, moins quand même que la précédente, et nous partons une nouvelle fois un peu couverts. Nous commençons à monter sur le chemin du pas de Barbacane, en essayant de deviner sur notre gauche le départ du chemin vers le vallon et le col de la Seccia. Nous voyons bien une bonne trace sur le flanc de la crête, mais rien pour y arriver. Nous décidons d'aller y voir de plus près à travers le pierrier et aboutissons aux restes bien conservés d'une route militaire qui arrive probablement du pas de Barbacane lui-même ou de pas loin en dessous.

Nous la prenons en direction du nord-est et commençons le contournement des crêtes de la Tête Cimon et de la Cime de Colle Longue. À la fin de la première montée, un couple de bouquetin nous barre un moment le passage, surtout le mâle, aux cornes impressionantes, qui attend que sa femelle soit hors de danger avant de consentir à libérer le chemin en quelques sauts dédaigneux. Nous arrivons à un premier petit col, d'où nous gagnons une première caserne mussolinienne sur une antécime de Colle Longue.

bouquetin
bouquetin barrant le passage


Nous repassons alors brièvement la frontière au col de la Sèche pour longer les lacs de Colle Longue avant de revenir en Italie sous le pas de Colle Longue devant une nouvelle caserne. De là, il s'agit de descendre un peu la route d'accès avant de prendre un sentier balisé en direction du col de la Guercha. Rapidement, le sentier se fait assez aérien, sans offrir de difficulté technique réelle. Nous nous offrons une pause au col avant une rude mais courte montée au pas du Bœuf. De là, nous gagnons la Tête Rougnouse de la Guercha par la crête frontalière.

col Longue
lacs de colle longue

Cette partie en Italie est assez éprouvante pour moi: les sentiers sont relativement bien tracés mais un poil aériens à mon gout! En faisant attention, même moi je passe bien, mais cela me demande pas mal de concentration, et je ne peux pas aller bien vite. Heureusement, après m'avoir un peu embêtés le matin, mes petits soucis de santé de la veille se dissipent. De plus les sentiers aériens où je ralentis Virgile ne font qu'une petite partie de l'itinéraire et je peux pleinement m'exprimer sur les pierriers et pistes, globalement on avance donc quand même vite jusqu'ici.


C'est alors que nous commettons la pire loose topo de ces trois semaines: en descendant de la cime, au lieu de prendre rapidement à gauche dans le vallon du Saboulé, nous suivons des traces sur le flanc droit de la montagne. Nous nous apercevons de notre erreur en voyant les lacs de Lausfer, dont une vallée profonde nous sépare. Nous repartons sur la crête de la cime de Prals, en espérant pouvoir descendre dans le vallon le plus tôt possible, mais cela ne donne pas les résultats escomptés, et, le terrain se faisant de plus en plus escarpé, après quelques passages de vires, Ludo suggère de redescendre à nos traces de l'aller pour repartir sur de meilleures bases.

Nous descendons chacun dans un creux différent, et à la sortie... plus de Ludo, qui était un peu devant et ne répond pas à mes appels. Ça commence à sentir mauvais, d'autant plus qu'évidemment pendant ce temps la météo se dégrade bien, laissant présager l'arrivée des orages prévus pour l'après-midi. Je décide de remonter en direction de la crête pour avoir une meilleure vue d'ensemble de la situation quand en me retournant, je vois Ludo qui arrive sur le chemin: il a pris plus de temps pour descendre, et, masqué par une barre rocheuse, ne m'a pas entendu. Une fois regroupé, nous faisons un rapide point topo, et le gros cairn qu'on aperçoit non loin de nous sur la crête semble être le point où il faut basculer dans le vallon.


Nous gagnons donc le cairn pour constater que si sur le côté opposé du vallon on voit bien une trace qui mène aux lacs du Lausfer, il n'y a en revanche rien de notre côté. La pente n'est toutefois pas trop forte, et nous commençons à descendre dans le vallon en direction des traces. Après quelques tâtonnements, nous finissons par tomber sur le vrai chemin, mais toujours sans voir comment il continue vers la Tête de la Guercha. Par contre, nous constatons que durant notre retour, nous avons abandonné la crête trop vite: une trace descend en lacets serrés de la cime de Prals, et nous aurait évité de revenir trop en arrière. Au bilan, nous n'avons perdu qu'une bonne heure, mais nous nous serions bien épargnés cette phase de stress.

Le pique-nique apporte un certain réconfort, et nous repartons à un rythme soutenu pour essayer d'atteindre Isola 2000 avant l'orage. Nous passons donc rapidement le col du Saboule et les lacs du Lausfer, où quelques randonneurs s'étonnent de notre vitesse, avant de repasser une dernière fois la frontière au col du Lausfer. De là nous progressons jusqu'au pas de Ste Anne où il nous faut redescendre jusqu'au lac du col de Ste Anne, toujours par une route militaire, où nous retrouvons l'itinéraire de la GTA emprunté en 99 avec Adrien et Romain.


Il s'agit de remonter sur la crête pour suivre la frontière jusqu'au col de la Lombarde.

Cette loose aura eu un seul avantage: elle nous aura assez énervés l'un et l'autre; assez pour nous donner une forme d'enfer après le repas, où on repart à un rythme costaud, on en profite aussi pour doubler des randonneurs qui  trainaient par là. Tout s'annonce à nouveau mieux: il ne nous reste plus qu'une remontée puis une longue crête avant d'atteindre le col de la Lombarde, on devrait quand même atteindre Isola en fin d'après midi; c'est à ce moment là que les premiers coups de tonnerre se font entendre. Si la pluie ne m'inquiète pas, je n'aime pas trop les orages tout de même, surtout si on est sur une crête. Pour essayer d'éviter le pire des éclairs, je vais essayer d'imprimer un rythme un peu plus élevé, mais Virgile proteste en prétendant que quand même trop vite, c'est trop vite. 

C'est en arrivant sur la crête que la pluie nous rattrape. Fort heureusement, l'orage ne se rapproche pas trop, et si nous nous mouillons un peu, cela reste supportable avec gore-tex, sursac et poncho pour assurer l'étanchéité de la tente.

La pluie s'arrête lorsque nous arrivons en vue du col de la Lombarde, où nous empruntons la route, refaite à neuf pour le tour de France, avant d'emprunter le sentier qui descend vers Isola 2000 en évitant les lacets. Ce sentier passe normalement devant un gîte, mais ce dernier est archi fermé. C'est dommage, car le premier orage n'a pas vraiment lavé le ciel. Nous descendons sur Isola 2000 par la piste, puis un petit sentier, et arrivons à la galerie commerciale où un gigantesque Sherpa nous attend. C'est une bonne nouvelle, puisque ça implique qu'il n'y aura pas besoin de faire le détour par St Martin Vésubie pour faire un dernier ravitaillement.

Du coup, Ludo prévoit une arrivée avec un jour d'avance, et nous faisons les courses en conséquence. Ensuite, nous observons la suite des évènements dans un sympathique bar, où nous remplissons également nos gourdes. Comme une timide éclaircie se dessine, nous prenons une deuxième bière en espérant que cela ira en s'améliorant. Hélas, c'est le contraire qui se produit, et nous partons assez vite en direction des pistes pour trouver un lieu de bivouac convenable. Au passage, nous constatons que le refuge est tout aussi fermé que le gîte. La station a encore du progrès à faire pour accueillir correctement les randonneurs.

Compte-tenu du poids des sacs (nous avons prévu un gros dîner comme après chaque ravitaillement, et nous avons en prime 3 jours de nourriture), et du fait qu'il commence à pleuvoir plus sérieusement qu'en début d'après-midi, nous choisissons un creux qui nous abrite des chalets d'Isola, un peu au-dessus du torrent. Le terrain est en pente et caillouteux, mais au moins nous arrivons à dresser la tente juste avant que le gros de l'orage nous tombe dessus.

Nous occupons le temps en téléphonant à droite à gauche pour informer de l'avancée, et Ludo confie en particulier à Fabien la mission de signaler aux Sophipolitains que le programme pourrait bien être décalé d'un jour, ce que nous confirmerons le cas échéant lorsque ce sera sûr. Les multiples coups de fil ont permis de laisser passer le pire de l'orage, et si nous commençons à faire cuire le dîner sous un poncho, la pluie s'arrête pendant que nous mangeons, et nous nous couchons sous un ciel clair.

C'est tout de même incroyable tout ce qui se passe en une journée, la distance parcourue, les paysages vus, mais aussi les aventures on va de loose, en orage, en passage de grande forme où les mètres de dénivelé défilent ... tout marche à un rythme différent, les échelles de temps, de distance de dénivelé changent; quand je pense au peu que j'arrive à faire en une journée de boulot .... Par contre la nuit sera elle froide et humide; en un mot mauvaise, pour moi en tous cas! Je pars quand même optimiste au matin et aimerais bien ateindre la Gordolasque aujourd'hui, mais je sais que c'est un peu ambitieux.   

Jour 18 (26/08/08) Isola 2000 - Gordolasque (St Grat) 2200m - 36km (en 9h45!, dont un Madonne de Fenestre - Gordolasque en 2h15)

Nous repartons de bon matin sous un beau ciel bleu. Par l'arrière de la station, en particulier de curieuses terrasses desservies par un chemin goudronné et qui sont peut-être une tentative avortée de camping, et une piste de ski bien raide, nous gagnons la piste qui monte au col Mercière, juste au-dessus d'Isola 2000. Delà, il s'agit de basculer dans le vallon de Mollières, que le soleil commence à éclairer.

Peu après le col, une surprise nous attend: un petit troupeau de mouflons se presse un peu en contrebas de nous. Quelque chose semble vraiment les attirer là, car ils s'en écartent à peine lorsque nous approchons, et reviennent au même endroit dès que nous sommes passés. Nous n'avons pas pu déterminer ce qui pouvait intéresser un mouflon à ce point (il y a de l'herbe et de l'eau partout autour), mais ça nous a permis de faire de belles photos.

La descente se poursuit, et nous atteignons bientôt le sous-bois et le ruisseau. Nous atteignons une piste un peu plus large, puis, au lieu de descendre sur Mollières, obliquons à gauche sur le grand chemin à flanc qui mène, en montant légèrement, vers le col de Salèse. Nous y surprenons quelques chamois un peu plus haut que nous dans la pente, mais en dehors de ça, il s'agit surtout d'un chemin qui n'en finit pas, obligé qu'il est de serpenter à travers tous les petits vallons qu'il rencontre sur son passage. Certains ruisseaux profitent d'ailleurs de l'orage d'hier pour déborder sur le chemin...

mouflons
Troupeau de Mouflons près du col Mercières

Nous finissons cependant par arriver sur le pont du vallon principal, au pied du dernier ressaut vers le col de Sallèse où nous nous accordons une pause et passons en short. C'est là que nous quittons l'itinéraire original vers St Martin Vésubie par le lac des Adus pour descendre dans le vallon de Sallèse. Nous allons faire la plus grande partie du trajet d'aujourd'hui sans carte, mais Ludo connaît la région par cœur.

Pour l'heure, Le GR52 descend au plus près du ruisseau, dans un sous-bois très agréable. Ludo repère quand même un peu au dessus de nous la célèbre source de Chardole, réputée particulièrement pure, et nous y faisons le plein d'eau. Nous parvenons ensuite rapidement au parking d'entrée (de sortie pour nous) dans le parc du Mercantour, et prenons la route qui longe la frontière du parc. Nice est indiquée sur les bornes kilométriques, mais encore à 75km.

Il y a un bon bout de route, heureusement pas trop fréquentée à faire, ce qui est effectué à un rythme soutenu pour ne pas trop s'y ennuyer. Toujours sur le GR52, nous commençons ensuite à remonter la vallée du Boréon. Le départ autour du gîte d'étape du Boréon est bien raide, avant un parcours à flanc, jusqu'à hauteur des vacheries du Boréon. Ensuite, on recommence à monter rapidement, sur un chemin où on n'a pas abusé du balisage mais qui reste relativement facile à suivre. De toute façon, l'itinéraire est simple: on remonte le ruisseau, agrémenté de jolies cascades. C'est un peu au-dessus de l'une d'elles que nous pique-niquons, sur un bon replat herbeux et ombragé, peu avant la passerelle et l'embranchement vers le lac de Trécolpas.

mouflons
Troupeau de Mouflons près du col Mercières


Le lac lui-même offre un petit replat bienvenu avant d'entamer la montée finale au pas des ladres, sur un terrain caillouteux mais avec un chemin bien tracé. Ludo respire un peu: l'orage ne nous a pas encore rejoint, nous allons pouvoir descendre tranquillement vers le refuge de la Madonne de Fenestre, et de là faire un point sur la situation météo. Le point se fait en fait plus ou moins dans la descente: s'il y a pas mal de nuages, le risque d'orage n'est pas énorme, et il est tôt. De plus, si nous réussissons à passer un col de plus aujourd'hui, le pari de gagner un jour en évitant St-Martin sera définitivement gagné.

Plus la journée avance, plus le ciel se couvre, ... et plus le rythme de marche s'accélère! On arrive à la Madonne de Fenestre à 15h; je suis un peu hésitant: les nuages n'ont pas l'air très gentils et on a déjà fait une bonne journée. Ca me plairait bien cependant de passer ce dernier col, mais je préfère laisser Virgile décider; je suis un peu surpris de sa réponse: il n'hésite pas et décide à continuer ... pas de problème, on fait le plein d'énergie et c'est reparti


La descente expédiée, malgré une cheville gauche qui m'inquiète un peu, nous ne nous arrêtons donc à la Madonne de Fenestre que le temps de grignoter quelques gâteaux et de faire de l'eau. Ensuite, nous traversons la Vésubie naissante pour commencer à remonter le vallon du Ponset, alors que la plupart des randonneurs en descendent et nous souhaitent bon courage. La montée est en effet une fois de plus raide, mais finalement assez courte, composée de trois ressauts entrecoupés d'épisodes plus plats permettant de se reposer. Pendant cette montée, nous tombons sur une famille de chamois, qui cette fois-ci est assez près pour être prise en photo.

La baisse des 5 lacs est atteinte, en même temps que le ciel commence à se dégager nettement. Nous contournons ensuite les lacs de Prals avant de découvrir un chemin de flanc qui nous évite de trop redescendre avant d'arriver sur le chemin de la baisse de Prals. Il reste une dernière petite montée (toujours raide) à effectuer avant d'arriver à la baisse. C'est là que nous rejoignons l'itinéraire de base, avec officiellement un jour d'avance sur le temps de passage prévu, un bivouac étant prévu à la baisse même.

chamois
Chamois en montant à la baisse des 5 lacs

Cependant, nous préférons nous payer le luxe de descendre dans le vallon de la Gordolasque, par un chemin là encore efficace, ce qui ne plaît toujours pas à ma cheville. Nous atteignons la route, que nous remontons sur un bon kilomètre, avant d'atteindre le gîte du relais des Merveilles, où il reste des places disponibles dans le dortoir.

Dortoir d'ailleurs très confortable, comme l'ensemble du gîte du reste, qui fournit également une très bonne cuisine. Une carte en relief permet d'apprécier la distance parcourue depuis Isola 2000, pour ce qui est une des plus longues étapes du trajet.

Mais ça valait le coup. Désormais, il ne peut plus arriver grand'chose d'ici Levens, on tient le bon bout. En attendant, ça fait du bien de prendre une bonne douche et de se poser un peu.

En effet, je crois que ça y est on ne craint plus rien, Virgile redoute encore un peu la montée au pas du Trem, mais moi je suis confiant. Surtout après la performance de cette dernière montée+descente à la baisse de Prals: on est vraiment allés très vite! Ca bourrinait, et c'était même pas trop dur, on s'est juste interrompus pour une ou deux très courtes pauses. Certes j'ai un peu souffert dans la descente pour essayer de suivre le même rythme de Virgile, mais c'était tellement court que ça n'a pas été un problème. Pour le rythme de la montée je plaide coupable, mais Virgile suivait alors je continuais! Dire que j'avais peur d'arriver au gîte un peu tard pour demander le repas, au bilan nous sommes même arrivés avant 18h. Aujourd'hui encore plus que les autres jours, j'ai passé mon temps dans les montées à penser aux amis, au point de les imaginer comme si ils étaient là; j'imagine déjà les prochaines randos, je crois que j'en aurai jamais assez. J'imagine certains qui me diraient dans la dernière descente "Ludo, là quand même tu te fais mal! pourquoi?", je ne sais pas ce que j'aurais répondu, peut être pour le plaisir d'avaler cette descente et pour le plaisir de me poser au gîte ... et puis c'est tellement bon de bourriner! Cette étape était vraiment au coeur de mon terrain de jeu habituel, et les nombreux souvenirs attachés à ces lieux étaient aussi l occasion  de me rappeler les amis avec qui j'ai randonné ici, avec une mention particulière pour le grand raid du mercantour (de 2005), dont nous avons suivi le parours pendant une vingtaine de km aujourd'hui.

Jour 19 (27/07/08) Gordolasque - Col de Lobe 1810m D+ - 33km

Nous sommes parmi les premiers levés. Pendant que je finis de me préparer avant le petit-déjeuner, Ludo discute avec une membre du groupe qui passe quelques jours au gîte, et glisse dans la conversation que nous sommes partis d'Isola 2000 hier, ce qui provoque son petit effet.

Après avoir mangé et payé, nous nous dirigeons vers la passerelle sous le gîte, où nous espérons trouver le sentier de la Cime du Diable. Je ne l'ai fait qu'une fois à la descente, dans la neige, sans qu'on suive vraiment de trace, à part tout en bas, mais Ludo est confiant dans l'existence d'un chemin. Il a raison, car un sentier monte résolument à travers bois et prairies. Au début de la montée, je me rappelle à temps qu'il faut souhaiter un bon anniversaire à Ludo, dont l'âge ne tient désormais plus sur 5 bits. En chemin, nous croisons deux personnes, qui ont dû passer la nuit en bivouac, avant de déboucher sur un grand replat herbeux où paissent de magnifiques chevaux noirs.

À partir de là, la montée vers le pas du Trem se fait dans un pierrier, avec quelques cairns. Il faut a priori rester assez à gauche si on veut profiter au maximum d'un chemin, mais on peut faire sa trace à travers les cailloux sans problème majeur. Le col offre une belle vue sur les lacs de la vallée des Merveilles et les sommets alentours, dont le Clapier et le Gélas. La montée vers la Cime du Diable est très raide mais courte et bien tracée. Au milieu, une plaque commémore le premier mort français des combats de 1940 dans les Alpes. Du sommet, on découvre un très beau panorama sur le Mercantour, mais aussi sur la côte, et on aperçoit la baie des Anges au loin. Ça se rapproche vraiment.

Dès le début, la montée emprunte un bon chemin et on rentre dans le rythme. Cette montée a eté exceptionnelle pour moi: tout va bien, en fait je pense au début à ce compte rendu et à ce que je vais raconter au retour puis je pense à beaucoup d'amis, surtout à ceux auxquels je n'ai pas pensé jusqu'à présent, aux anciens amis que je n'ai pas vus depuis longtemps. Du coup, la tête dans mes pensées, j'avance! J'avance même vite, sans trop penser à vérifier si Virgile suit toujours. En général c'est le cas mais une fois ou deux je dois m'arrêter pour l'attendre: il a dû s'arrêter, mais pris dans mes pensées je ne m'en suis pas rendu compte. C'est donc sans avoir l'impression d'avoir vraiment forcé que j'arrive dans le pierrier final du pas du Trem, et les derniers raidillons de la Cime du Diable, mais à ce moment là il ne reste presque plus rien. Et quel plaisir de fêter son anniversaire en haut de la cime du Diable, avec une belle vue sur le Mercantour, surtout en compagnie de tout ce monde (tout au moins en pensées ...).


panorama de la Cime du Diable
Panorama de la Cime du Diable

Nous venons en fait d'achever la dernière grosse montée (dans les 1000 mètres) de la randonnée. On ne va certes pas faire que descendre, mais les remontées qui restent ne devraient plus excéder 500 mètres consécutifs, et encore. Pour l'heure, après une pause grignotage, nous descendons la crête Sud de la Cime du Diable en direction de la Baisse Cavaline, où nous retrouvons le GR 52, et du col de Raus.

La descente s'achève à la Baisse de St Véran, où nous attaquons la montée vers l'Authion au milieu d'anciennes fortifications. La grande piste à la pente régulière où nous marchons se prête bien à un rythme soutenu, et nous atteignons rapidement la crête de l'Authion, où la proximité de la route se manifeste par un nombre important de personnes. Un tout petit détour par la Pointe des Trois Communes nous permet de voir l'ancien fort qui commandait la vallée, et de se renseigner sur son histoire fort ancienne de point stratégique.


Nous partons ensuite par la crête Ouest, pour pique-niquer à l'ombre des sapins. Ludo téléphone à Sémi pour confirmer que nous serons bien chez lui avec un jour d'avance. Au vu de notre position, Sémi essaie de nous convaincre que nous pouvons même arriver ce soir, mais nous déclinons l'invitation. Après le repas, le chemin continue sur la crête en direction de la baisse de Camp d'Argent. De là, il faut prendre la route sur une petite centaine de mètres, avant de trouver en contrebas le chemin de flanc qui descend sur le col de Turini.

 

Au col, nous voyons un nouveau poteau indiquant Nice à 70km, puis, quelques mètres plus loin, à 35km par une route plus directe. En attendant, il s'agit de prendre le GR52A, qui emprunte une piste qui monte pleine pente avant de contourner la Cime de la Calmette. En descendant vers la Baisse de la Calmette, nous croisons un couple de randonneurs assez agés et bien chargés qui font le GR52. Après avoir échangé quelques mots, nous poursuivons la descente sur la piste jusqu'à la Baisse de Peïra-Cava, puis le hameau du même nom. Nous espérions y prendre un raffraîchissement avant de décider d'un point de bivouac, mais les cafés existants ne nous donnent pas vraiment envie de nous arrêter, et nous nous contentons d'aller faire de l'eau à une fontaine que Ludo avait repéré lors d'un tour à vélo en juillet. Ça nous prend un peu de temps, car une colonie de vacances arrive juste avant nous, et tous les gamins veulent boire.Nous en profitons pour grignoter quelques gâteaux en essayant d'identifier un possible point bivouac, mais il faut se rendre à l'évidence: il va falloir encore marcher un bon peu avant de trouver quelques chose de correct. Les réserves d'eau refaites, nous faisons demi-tour pour aller prendre le chemin qui monte sur la crête au Sud du hameau. Le sentier suit la crête, puis arrivé à un vaste replat où débouche une route s'interrompt plus ou moins. La carte nous indique qu'il faut continuer vers le pylône tout proche, où nous retrouvons sentier et balisage.

L'après midi (de la pointe des 3 communes à la cime de Rocaillon surtout) consiste principalement en un enchainement de montées raides et de descentes cool et agréables; ce genre de terrain me plait bien, on avance encore une fois plus vite que prévu et décidons de bivouaquer juste avant la Rocassierra. Juste après Peira Cava (j'ai peut être un peu fait le clown), ma hanche commence à me faire mal, très vite cela devient très douloureux, je pense au poids et à la position du sac, je le replace mais ça fait encore mal. Virgile me propose gentiment d'alléger mon sac mais craignant que ça ne fasse rien je préfère avancer pour atteindre le bivouac au plus vite.


Nous arrivons ensuite à la Baisse de la Cabanette, d'où nous remontons vers la Cime de Rocaillon (c'est court, mais c'est vraiment raide!). La côte est de plus en plus visible. Par contre, le chemin se perd dans la descente de la cime, mais nous retombons dessus après quelques mètres de descente pleine pente. Après avoir traversé la route, nous nous retrouvons sur une piste d'exploitation d'une coupe récente, qui a un peu mis à mal le début du sentier balisé. Après quelques tâtonnements, nous trouvons néanmoins la descente en sous-bois qu'il faut emprunter.

Après nous avoir fait faire le tour de la montagne, le sentier se décide à nous mener au Col de Porte, où nous tombons sur le GR510, qui emprunte une large piste en faux-plat. Nous quittons assez vite le GR pour monter vers la Cime de Plan Ribert, à un endroit qui a manifestement souffert de l'incendie il y a quelques saisons. La pente se fait plus raide, d'autant plus que la journée commence à être longue, et il n'y a pas de replat en vue pour poser la tente...

Heureusement, le paysage change brusquement quand on débouche sur la crête principale de la Cime. Un vaste replat tapissé de paille et ombragé par des mélèzes s'offre à nous et constitue un excellent lieu de bivouac, le dernier de la randonnée. J'en profite pour recoudre une dernière fois mes chaussures. Grand luxe par rapport aux journées précédentes, comme il fait beau et que nous sommes nettement plus bas, la température est très convenable, et nous pouvons donc prendre nos aises pour dîner plutôt que de nous enfermer le plus vite possible dans la tente.

Voilà, encore un jour bourrin mais c'est pour la bonne cause: il ne nous reste plus que deux petites étapes à parcourir. Espérons que ma hanche ira mieux demain, mais bon de toutes façons je tiendrai jusqu'à Nice, je me connais, cela ne fait aucun doute.

Jour 20 (28/08/08) Col de Lobe - Levens  700m D+ - 16km

La journée ne s'annonce pas trop chargée, mais nous démarrons comme d'habitude. Du col de Lobe, une première petite montée nous amène au pied de la Cime de Roccassièrra, dont les rochers donnent un petit goût alpin au chemin, même si ça n'a rien à voir avec les cimes du Mercantour. Nous rencontrons quelques moutons sur le chemin juste sous le sommet. 

À la cime de Roccassierra><br>
<font size=À la cime de Rocassierra

Bonne nouvelle: ma hanche va mieux, elle me fait encore mal, mais la douleur vive est devenue grosse gêne (la gêne/petite douleur durera 3 semaines quand même). Mais en effet, l'habitude est là et le rythme est élevé (c'est encore moi qui suis devant). La journée est belle et agréable pour l'instant.

Le chemin continue ensuite sur la crête, par le col de l'Autaret jusqu'aux ruines de Rocca Sparvièra, joli petit hameau abandonné. Nous descendons à la chapelle et au col St Michel par un chemin quasiment taillé dans la roche, avant de retomber sur un terrain moins rocailleux. Une portion de piste en faux-plat montant nous attend alors, avant de déboucher sur la crête du Férion, après avoir traversé un troupeau de chèvres.

Le chemin se met alors à monter pleine pente, coupant un lacet de la piste, où nous croisons les bergers, puis continuant en ligne droite sans trop se poser de questions. Heureusement, ça ne dure pas très longtemps, et nous arrivons au pied du poste d'observation contre les incendies qui se trouve au sommet du Férion.

Rocca Spavièra
Ruines de Rocca Spavièra

Comme nous nous apprêtons à repartir après une petite pause grignotage, nous apercevons les gardes de permanence, qui nous proposent de partager leur petit-déjeuner (ce que nous déclinons, nous avons déjà bien mangé), et de monter dans la salle d'observation proprement dite. La vue, sur la côte comme sur le Mercantour, y est vraiment extraordinaire.

Du Férion, on pourrait redescendre directement sur Levens, mais ça nous ferait arriver vraiment trop tôt. Ludo propose donc de suivre la crête vers le Sud. Nous passons par une seconde chapelle St-Michel, et continuons vers le col de Rosa. De là, nous quittons la crête pour prendre le sentier qui se dirige vers le col du Travail, par un chemin qui descend tranquillement. Après le col se situe une dernière petite remontée en plein soleil, où nous découvrons tous les deux que nos camel bags sont vides.

Il fait chaud et on manque d'eau, cette descente est moins agréable que dans mes souvenirs, mais il est quand même à peine midi quand nous arrivons chez Sémi et Véro ...

Fort heureusement, ce n'est pas très grave, car quelques minutes plus tard nous arrivons à la route, et juste après chez Sémi et Véro. L'accueil est parfait comme toujours, mais nous découvrons que Sémi s'est cassé le coude le week-end d'avant à VTT et en a a priori pour 3 semaines de plâtre, ce qui n'est pas sans poser problème pour l'organisation de la maison.

L'après-midi n'est pas particulièrement actif, mais au moment du dîner, (demi-)surprise: Fabien, Nico D., Évelyne, et Rémi débarquent pour fêter l'anniversaire de Ludo au cours d'un très bon et très copieux repas. Et dire qu'il va falloir se lever demain pour achever définitivement le parcours...

Oui, ça fait du bien de revoir tout ce monde, ça fait plaisir, plus encore la présence des amis que le superbe cadeau et le repas délicieux préparé par Véro. Espérons que ça nous donnnera le courage de se lever tôt demain: le changement de rythme est brutal car au lieu de se coucher autour de 21h, on se retrouve au lit après minuit ....

Jour 21 (29/08/2008) Levens - Nice - 900m D+ - 28km

Nous avons définitivement trop mangé hier soir, en particulier du succulent gâteau au chocolat confectionné par Véro et Marjane, mais nous sommes quand même à peu près prêt à effectuer ce dernier tronçon, d'autant plus qu'il ne présente pas de difficulté, à part peut-être un peu de distance. Nous partons en même temps que Véro, mais elle n'est pas en vacances.

Suivant les indication données par Sémi la veille, nous descendons vers la départementale et traversons le grand pré à côté du terrain de foot pour retrouver le GR5, que nous allons suivre presque toute la journée. Le sentier fait quelques détours à travers les collines, mais finit par nous amener à Ste Claire, où il prend la route sur un bon moment, jusqu'au col de Rocca Partida. Il s'engage alors sur la crête du Mont Cima. Le GR proprement dit prétend éviter la cime, mais nous faisons le (petit) détour, pour découvrir encore une fois une splendide vue sur le Mercantour, et sur Nice, maintenant toute proche. Nous retrouvons le GR de l'autre côté du mont et descendons sur Aspremont. Ce village est un lieu d'intersection de GR, mais les balises ne l'indiquent pas vraiment. Heureusement, Ludo surveille la carte de très près et nous remet dans le droit chemin.

Suivant là encore les conseils de Sémi, nous quittons une nouvelle fois le GR pour monter en direction de la baisse de Guigo. Heureusement qu'il s'agit de la dernière montée de la journée, car il commence vraiment à faire chaud. Une fois à la baisse, nous prenons la petite route qui mène au Mont Chauve d'Aspremont et à son grand fort, maintenant propriété des scouts et guides de France. Mais si nous avons une belle vue sur Nice, il n'y a pas vraiment moyen de contourner le fort pour aller voir les montagnes.

Aspremont
Aspremont

Nous n'insistons pas vraiment et entamons la redescente sur la crête de Graus, qui doit nous mener directement sur Nice. Nous récupérons rapidement le GR, et le parcours de crête peut commencer. Le paysage est très différent de ces derniers jours. C'est maintenant de la garrigue classique. Nous pique-niquons une dernière fois juste avant de terminer la descente vers la route et les faubourgs de Nice.

La suite promet d'être complètement inintéressante, mais il faut quand même achever le trajet. Nous ratons une balise du GR et prenons trop à gauche, pour déboucher sur la route au niveau des Giaïnes. Nous prenons la route à droite et tombons sur le carrefour où le GR file sur Gairaut avant de passer l'autoroute sur une passerelle. Nous passons alors à proximité du stade, avant de tomber sur l'itinéraire du tramway, que nous suivons jusqu'à la gare.

Ça y est, la ChamoNice est terminée. Bien sûr, nous sommes très contents d'être arrivé jusque là, avec même un jour d'avance sur le plan prévu, mais ça fait un peu bizarre de se dire que tout ça est maintenant derrière nous et qu'il va falloir reprendre une activité normale.

Eh oui, c'est déjà fini: on est contents d'arriver à la fin de notre périple, c'est un bel exploit et de superbes souvenirs! Mais que cela va être dur de retourner au boulot Lundi. La dernière journée n'a pas été la plus facile: la traversée de Nice n'est pas agréable (c'est la ville), mais elle est assez courte en arrivant du Mont Chauve (1h pour atteindre la Gare depuis le début des habitations); mais surtout il fait une chaleur intenable, heureusement que cela ne monte plus. Quand même la demie heure dans la gare a été très dure. Il faisait meilleur dans nos montagnes, le retour à la civilisations est difficile. J'ai un petit regret et me demande si la montagne parcourue n'était pas plus mon univers que celui que l'on retrouve ici ...


En attendant, nous prenons des billets pour revenir à Antibes, et décidons de ne prendre que le second train, ce qui nous donne le temps d'aller jusqu'à la mer, et surtout de déguster de succulentes et copieuses (mais un peu chères) glaces chez un glacier de la Promenade des Anglais, en bordure de la zone piétonne.

À Antibes, nous passons voir Pascal, Valérie, et leurs enfants, qui viennent juste de rentrer, et nous faisons un petit tour dans le vieil Antibes en discutant de nos vacances respectives. Ensuite, il est temps de prendre le bus pour Sophia. Ce dernier ne passe pas à l'INRIA, où Ludo a laissé sa voiture, et ce dernier se débrouille pour qu'on prenne un itinéraire qui conclura définitivement la rando par une montée (de 30 mètres, certes).

À l'INRIA, un petit gag nous attend: la batterie de Ludo n'a pas apprécié d'être abandonnée aussi longtemps, et il faut un peu pousser pour faire démarrer la voiture. Heureusement, après un petit tour de Sophia, la batterie est suffisamment rechargée.

Après avoir pris une douche et enfilé des vêtements propres (Ludo me prête un t-shirt pour l'occasion), nous pouvons donc aller fêter la fin définitive de la ChamoNice avec Nico D., Max et Carine dans une pizzéria de Pont-du-Loup.

En ce qui me concerne, il me reste encore à rallier (en train, pas à pied) Lyon. Ce sera fait le samedi, malgré un "incident voyageur" en gare de Juan les Pins, qui rend mon trajet Antibes-Marseille en TER particulièrement inconfortable, le train étant rapidement bondé. Heureusement, la SNCF a fait en sorte que les correspondances TGV attendent à Marseille, et le reste du voyage se passe très bien.

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